Dis bonne nuit, une phrase anodine derrière laquelle se cache un drame. Christian Blanchard joue une partition à deux vitesses dans ce polar court mais intense.
Approche originale
Leïla est une jeune détective privée, cantonnée à des affaires d’adultères, mais qui chérit sa liberté, sa solitude, à travers son métier. Refusant de s’engager, même dans sa vie privée. Au delà de celle d’un de ses clients, ce roman sera autant son histoire, pimentée de rêves faisant ressurgir son passé enfoui.
L’écrivain va déployer son talent dans ce qu’il réussit le mieux, le roman noir social teinté d’histoires personnelles. Bien ancré dans son temps, avec une approche originale et intéressante de la guerre des sexes.
Bienvenue dans le « joli » monde des associations masculinistes défendant les hommes, brutalement ou en sous-main. Pour qu’ils retrouvent leur vraie place, selon eux. Et que les femmes reprennent la leur, celle des devoirs et non des droits.
Pour ceux, comme moi, qui sont particulièrement sensibles à l’égalité homme / femme, la radicalité de ce type d’organisation est une agression. C’est d’ailleurs une partie du but qu’ils recherchent.
Engrenage mystérieux
L’approche du roman est habile et sert autant le propos social que le récit fictionnel. On est rapidement pris dans l’engrenage mystérieux d’une affaire issue d’un adultère dévoilant l’homosexualité du mari trompeur.
La disparition de l’amant va se transformer en enquête dans un milieu radicalisé que rien ne semble arrêter. D’autant plus qu’on ne parlera bientôt plus seulement de disparition…
Christian Blanchard ne craint pas d’appeler un chat un chat, sans pour autant jamais forcer le trait. Sa plume directe, écriture au présent sobre mais expressive, est parfaite pour raconter ce récit au plus près des ressentis de son héroïne, Leïla Le Menn.
Elle va peu à peu perdre pied à cause de ses rêves devenant cauchemars, et de son enfance qui revient la hanter. La disparition dont elle s’occupe est une chose, sa vie bâtie sur des fondations instables est bien le second ventricule du cœur de ce roman. Il y a décidément mille manières de parler d’histoires de famille.
Artisan
250 pages à coups de chapitres courts et souvent tendus, qui dévoileront peu à peu toute la profondeur d’un récit noir mais humain.
Christian Blanchard est un bel artisan du roman noir. Qu’il se penche sur le passé comme avec son précédent et excellent Antoine, ou sur un récit contemporain, il sait parler de la société à travers les émotions de ses puissants mais fragiles personnages.
Dis bonne nuit arrive à sortir du lot par son angle d’attaque. Et touche par les émotions transmises, sans chercher à les exagérer, au plus près de l’humain.
Lien vers l’interview de Christian Blanchard au sujet de “Dis bonne nuit”
Yvan Fauth
Sortie : 11 mai 2023
Éditeur : Belfond
Genre : Roman noir
Prix : 21 €
4ème de couverture
Rennes, de nos jours
Jeune privée rennaise, Leïla Le Menn n’aime rien tant que son indépendance. Un amant auquel elle ne fait aucune promesse, un van qui lui sert d’appartement, un job fait d’imprévus : la jeune femme met de la distance dans tout, refuse toute forme d’attache.
Leïla est aussi une coriace. Fille de flic, la trentenaire s’est taillé une réputation dans le milieu. Mais une banale affaire de disparition va l’entraîner sur une pente glissante. Hubert, un quinqua gay, s’est volatilisé après avoir laissé une lettre énigmatique à son amant. L’homme est accro aux sensations fortes, aux pulsions mortifères et, plus déroutant encore, adhérent d’une association masculiniste radicalisée. Une association qui soutient justement les revendications d’un père de famille qui vient de s’accrocher à la pointe d’une grue pour réclamer la garde de son fils.
Quel lien entre cette association et la disparition d’Hubert ? À mesure qu’elle pénètre le monde secret du quinqua, Leïla voit son passé ressurgir, celui dont l’écho peuple ses cauchemars : le souvenir de sa mère, dont le suicide au commissariat de Rennes, douze ans plus tôt reste un mystère aux yeux de tous ; les visions incomplètes de secrets ensevelis.
Au fond d’elle, Leïla détient les clés d’hier et de demain. Mais aura-t-elle le courage d’ouvrir cette porte quand les mensonges sont plus supportables que la vérité ? Alors qu’une traînée de cadavres parsème son enquête, Leïla n’aura bientôt d’autre choix que de confronter son passé…
Catégories :Littérature
Merci pour ce premier retour lecture. J’ai un profond attachement pour cet auteur qui mélange faits d’actualité et fictions. Quand je commence un de ses livres, ma vie s’arrête, il n’existe plus rien que cette symbiose avec Christian Blanchard . C’est un de mes auteurs préférés vers lequel je me tourne quand je suis en panne de lecture. Tu l’auras compris, hâte de lire son nouveau roman ….
voilà un très joli cri du cœur ! Bonne future lecture !
Très intéressant, surtout que je viens de terminer « La colère » qui développe aussi le masculinisme.
dans un style totalement différent
Thème peu abordé, je trouve (je l’avais rencontré dans “le silence selon Manon”) mais qui m’interroge beaucoup ! Je note !
et pourtant, il y a de quoi dire sur le sujet !