Ghislain Gilberti est le sniper du polar. Tout ce qu’il vise est étudié avec minutie, dans les moindres détails, et ses mots en rafales font des dégâts considérables.
Son univers est tentaculaire, sorte d’hydre à têtes multiples, qui à chaque livre étend son emprise sur les lecteurs.
Ce nouveau roman se veut indépendant des précédents, mais des liens souterrains sont tissés avec le passé, pour toujours asseoir davantage ses livres-monde.
Méticulosité
En résumé, nouveaux lecteurs vous serez pris au piège sans réserve, lecteurs habituels vous en ouvrirez grands les yeux de surprise (l’auteur vous l’explique avec une note avant le roman, que j’aurais mieux vue à la fin).
Quand on y regarde de loin, l’écrivain belfortain n’invente rien dans le milieu du polar. Mais à les examiner de près, on se rend compte que ses romans sont singuliers dans la manière de les mener. Celui-ci ne fait pas exception.
Il est cette fois question d’un tueur en série illuminé qui permet à Gilberti de développer une intrigue intense aussi violente qu’iconoclaste. Au plus près de l’enquête.
C’est là que se déploie sa particularité, et où il fait montre de tout son savoir-faire. Pour lui, chaque détail compte, chaque donnée de l’investigation est racontée avec méticulosité. Et le plus fort, c’est que ça ne ralentit pas l’intrigue, ni ne fait chuter l’extrême tension.
Borderline
Il faut dire que tous ses personnages sont borderlines, à l’image de ses flics. Son équipe est totalement dévouée à sa tâche, s’en est un vrai sacerdoce. Mais ils ont leurs (grosses) parts d’ombre, à l’image de son principal intéressé, Seth Kohl, chef du groupe chargé de l’enquête à la Brigade criminelle du SRPJ de Versailles.
Lui, ce sont de lourds boulets qu’il doit traîner pour avancer. Mais comme il n’a plus rien à perdre, il en est d’autant plus dangereux.
Avec Gilberti, la frontière entre bien et mal est toujours poreuse. Rien n’est simple, rien n’est écrit.
Cet Évangile de la colère est un peu la substantifique moelle de son œuvre, un bon résumé de ce qu’est l’univers de l’auteur, en 550 pages. Il a tiré le suc, l’essence même de ses précédents polars, pour incendier cette nouvelle affaire.
Démons intérieurs
N’imaginez pas pour autant qu’il est enchristé (un mot qu’il utilise souvent) dans un schéma. C’est plutôt qu’il le dessine encore et encore, pour en améliorer le trait. Même si paradoxalement ce nouveau roman m’a parfois fait penser à son formidable premier livre, Le festin du serpent, pour lequel j’ai un attachement tout particulier.
L’univers de l’écrivain est pénétré de démons, partout, tout le temps. Cet évangile-là tout autant. C’est sombre au possible, ténébreux à souhait, violent à la limite de l’acceptable, punchy à rendre groggy.
Mais, j’insiste, d’une finesse dans la narration, d’un ultra réalisme qui fait qu’on reconnaît immédiatement sa griffe. Qui laisse de profondes cicatrices.
L’auteur a besoin que ça sonne juste, et pour ça il insiste pour tout cadrer dans les moindres détails. En parlant de ce qu’il connaît, pour l’avoir vécu ou pour s’être sérieusement renseigné. Il dit souvent qu’il ne sait pas inventer et qu’il doit se baser sur du réel, y compris lorsqu’il crée des personnages. Et j’ai comme l’impression qu’il a mis beaucoup de lui dans ce roman-là.
L’évangile de la colère est un polar dense et brutal, plongeant le lecteur en immersion totale dans une enquête qui déménage. Pour un final qui laisse des traces. Avec un Ghislain Gilberti qui tient l’instrument de combat sans flancher, sans trembler, avec une précision remarquable.
Yvan Fauth
Date de sortie : 21 avril 2022
Éditeur : Hugo
Genre : Polar
4ème de couverture
Au commencement, il y eut un enfant.
Le petit Gabin Schwartz. Six ans. Son corps retrouvé dans un parc. Exsangue.
Puis ce fut un agriculteur. Enterré vivant. Son index désignant le ciel.
Puis un marchand ambulant, écrasé sous son stock.
Sale baptême du feu pour Seth Kohl, le chef du groupe chargé de l’enquête à la Brigade criminelle du SRPJ de Versailles. Comment avancer quand rien ne relie les victimes entre elles ?
Alors que les corps s’accumulent, un lien se dessine enfin, inattendu, fragile et incomplet : le tueur pourrait bien s’inspirer des Danses macabres, ces fresques que l’on retrouve dans les vieilles églises, ou dans les bibliothèques des collectionneurs.
Mais chaque série de tableaux est différente. Laquelle est la bonne ? Le temps presse, et Seth Kohl est assailli par ses propres démons, qui l’invitent eux aussi à quelques pas de danse avec la mort
Catégories :Littérature
Hâte de découvrir ce nouveau roman après avoir lu la trilogie des borderlines.
tu ne seras pas déçu !
J’aime quand c’est borderline. Merci à toi Yvan. 🙏😘 Je me noie dans ma salive. Tellement tu donnes envie de le lire.
Voilà qui annonce un condensé de tout ce que j’aime !
clairement, c’est ton genre 😉
Je suis en plein dedans…et j adore !
Je pourrais jamais dire ou écrire mieux que ce que je viens de lire.
Bravo pour cette chronique Yvan Fauth.
Et encore bravo à Ghislain…👏👏👏
merci pour ce compliment :-). Bonne fin de lecture !
Comme tu en parles bien !