Martin Servaz se confronte au monde étrange du cinéma de genre, un univers qui lui est totalement étranger. Horreur, malheur !
Bernard Minier nous fait regarder en face cette sphère cinématographique, Un œil dans la nuit collé au judas. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ce voyage intérieur va laisser des traces.
Sujet approfondi
Quand Bernard Minier se lance dans un projet, il ne fait jamais les choses à moitié. Là où tant d’autres auraient pris le sujet avec légèreté, il a visionné plus de 200 films d’horreur pour se mettre dans l’ambiance de l’intrigue. L’histoire ne nous dit pas dans quel état il en est ressorti.
Ce nouveau roman autour de Servaz et de son équipe coche toutes les cases d’une réussite éclatante. Avec une atmosphère plombante, où l’écrivain joue sa partition mortifère en collant parfaitement à la thématique.
On s’approche à petits pas d’une idole, d’un génie reclus. Morbus Delacroix est un réalisateur qui a marqué le genre par sa capacité à capter l’attention des spectateurs, à les fasciner autant qu’à les choquer. Après avoir tourné un dernier film devenu légendaire, que personne n’a jamais vu, qui n’a jamais été diffusé, il vit cloîtré, baigné tout entier dans son art, sa vision du monde. Un génie ou un fou, mais un personnage à part, clairement.
Hurlement !
Les membres de son ancienne équipe de tournage, techniciens et producteur, se mettent à dérailler, à mourir pour certains. L’affaire se présente de manière aussi surprenante que pourrait l’être un film.
Un œil dans la nuit est un divertissement de haut vol, avec plusieurs scènes d’anthologie qui vont marquer au fer rouge l’imaginaire des lecteurs. Attendez-vous à hurler !
Une enquête folle, qui plonge les protagonistes dans les ténèbres, secouant comme jamais l’équipe Servaz.
Mais derrière la forme, derrière une intrigue qui se révèle digne des meilleures productions terrifiantes, on peut y voir un deuxième niveau de lecture. Proposer un divertissement assumé n’est pas incompatible avec la notion de talent.
Le cinéma de genre, et le thriller en littérature, restent parmi les derniers espaces de liberté. Dans des sociétés qui s’aseptisent de plus en plus, ces vecteurs sont aujourd’hui comme les terrains privilégiés de cette liberté créatrice. Le sujet est là, omniprésent en toile de fond.
Déclaration d’amour au genre
On sent une vraie jubilation de Minier à écrire certaines scènes et décrire certains personnages. Et c’est clairement contagieux.
Mais l’horreur est loin d’être le seul thème du roman, ce serait trop simple. Ce thriller est tout sauf une énième banale production. Certains passages sont très forts émotionnellement, inoubliables.
Que ce soit concernant Servaz lorsque l’auteur parle de filiation, ou quand l’écrivain évoque (avec intelligence) le complotisme. Parce que rien n’est plus difficile que de distinguer le vrai du faux, dans ce monde de l’illusion qu’est le cinéma.
Un œil dans la nuit braqué sur lui, Servaz paye le prix du danger dans cette enquête qui prend aux tripes. Bernard Minier réussit formidablement son coup, à travers une intrigue qui va vous en mettre plein les yeux, une pyrotechnie à voir comme une déclaration d’amour au genre, du cinéma à la littérature.
Yvan Fauth
Sortie : 06 avril 2023
Éditeur : XO
Genre : thriller
Prix : 22,90 €
4ème de couverture
Dans les montagnes, retiré du monde, un réalisateur de films d’horreur, Morbus Delacroix.
Culte, misanthrope, fou.
Parmi ses fans, une étudiante en cinéma.
Fascinée, intrépide, inconsciente.
À Toulouse, un as des effets spéciaux est retrouvé mort, ligoté sur un lit d’hôpital.
Et si ce meurtre trouvait sa source dans un film maudit ?
Pour le commandant Martin Servaz, peut-être la plus grande énigme de sa carrière…
CET ŒIL DANS LA NUIT N’A PAS FINI DE VOUS FIXER
Catégories :Littérature
J’avais même pas fait attention qu’il y avait un nouveau Minier ! Si si !!!
a la ramasse je suis, je crois …
Hurlement il y a eu… 😉
Émotions largement présentes
Atmosphère très réussie
Enquête captivante
Et effectivement un vrai second degré de lecture.
Tout ça est magistralement chroniqué chef !
j’ai pensé à toi en écrivant cette phrase 🙂
Ahahahaha !!!
Tu m’étonnes !
Je suis en retard dans la série… mais tu es diablement tentant !