Personne ne meurt à Longyearbyen – Morgan Audic

Morgan Audic sait prendre son temps. Quatre ans séparent son précédent roman, De bonnes raisons de mourir, de celui-ci. Il fait dire qu’il est allé poser ses valises de romancier à un endroit où Personne ne meurt à Longyearbyen, un vrai challenge pour un auteur de polar.

Et même pour cette histoire, il a décidé de poser son ambiance, d’utiliser ce temps pour nous immerger dans les étonnantes contrées norvégiennes.

Qui regarde le monde

Décidément, les auteurs français de polar aiment beaucoup expatrier leurs intrigues, une universalité assez unique dans la littérature mondiale. L’intrigue voit ici double, deux coins différents de la Norvège, mais liés par cette nature encore omniprésente.

D’un côté les îles Lofoten, sans doute le coin le plus touristique du pays, du moins à une autre époque de l’année que cette période où le soleil émerge à peine de longs mois de nuit.

De l’autre, Longyearbyen. Un choix comme un symbole de l’empreinte humaine, de ses dégâts. La ville la plus au nord du monde et surtout celle qui se réchauffe le plus vite sur notre terre malade.

Morgan Audic raconte des histoires mais regarde aussi le monde. Droit dans les yeux. C’est même le point saillant de son récit, au-delà de l’intrigue policière.

Croisement

Deux morts, violentes mais non criminelles de prime abord. Des coins reculés, une enclave russe au beau milieu de la Norvège. Des mammifères marins échoués qui semblent avoir été scarifiés par l’Homme.

Ce sont deux enquêtes croisées, schéma classique, qui vont se rencontrer jusqu’aux révélations finales.

Que ceux, comme moi, qui ont applaudit à la lecture de De bonnes raisons de mourir ne s’attendent pas à une redite ni au même genre d’ambiance.

Difficile de s’empêcher de comparer les romans d’un auteur, même s’ils sont clairement différents dans leurs approches. Il n’empêche, le précédent m’avait subjugué, mon ressenti émotionnel est cette fois-ci un cran en dessous.

Alors que le précédent roman était tout en tension, un vrai thriller, celui-ci navigue vers d’autres eaux. A la nordique, en somme, inscrit dans un faux rythme durant les 2/3 du récit.

Divertir et questionner

L’auteur a des choses à dire, et c’est tant mieux. La partie polar assez conventionnelle, sans grande surprise, est surtout le cadre qui permet de traiter de sujets forts et de placer des personnages touchants face à la marée qui monte.

Celle qui risque de submerger notre monde, à force de ne pas respecter le vivant autour. A l’image de ces animaux aquatiques qui se révèlent d’une intelligence étonnante, mais dont l’existence et leur nature-même sont mises en danger par le comportement d’une humanité qui tend à se saborder.

Le roman n’a rien d’un pamphlet, c’est une vraie histoire mais qui intègre diverses préoccupations environnementales. L’écrivain a sacrément bien bossé ses sujets pour un divertissement comme support pour réfléchir au monde.

Personne ne meurt à Longyearbyen, sauf peut-être l’humanité. Celle qui fait de nous les garants du futur, comme celle qui touche aux émotions. Morgan Audic utilise le polar pour nous questionner autant que pour nous divertir, sans nous détourner des vraies valeurs. C’est là le sens premier de son texte.


Yvan Fauth

Sortie : 20 septembre 2023

Éditeur : Albin Michel

Genre : Polar / thriller

Prix : 21,90 €

4ème de couverture

Archipel du Svalbard, Longyearbyen, la ville la plus au nord du monde. On découvre le corps d’une femme vraisemblablement déchiquetée par un ours.

Norvège continentale, les îles Lofoten. Le cadavre d’une ex-journaliste est retrouvé sur une plage isolée.

A priori rien ne lie ces victimes si ce n’est qu’elles s’intéressaient de près aux mammifères marins. L’une était doctorante en biologie arctique, l’autre, à la tête d’une agence d’excursion en mer.

Dans ces régions glacées, faites d’anciennes cités minières désolées, d’enclaves russes et de conflits politiques qui ne demandent qu’à rejaillir, une flic pugnace et un reporter de guerre en déroute remontent une piste sanglante, se confrontant à la réalité d’une terre où la nature est une marchandise et ses défenseurs des cibles de choix.



Catégories :Littérature

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6 réponses

  1. Collectif Polar : chronique de nuit – Simple bibliothécaire férue de toutes les littératures policières et de l'imaginaire.

    Celui c’est certain, je le lirai.
    J’avais adoré le premier et même si des deux polars ne se ressemble pas, même si tu as un peu moins aimé, je sais que je me plongerai dans les maux (les mots) que nous propose notre auteur.

  2. Ma Lecturothèque – Blogueuse littéraire

    Je suis très curieuse de le lire et il a d’ailleurs rejoint ma PAL. Je n’ai pas lu le précédent roman de Morgan Audic, ça va être une découverte pour moi !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Bonne découverte alors !

  3. Aude Bouquine – « Lire c’est pouvoir se glisser sous différentes peaux et vivre plusieurs vies. » Ici, je lis, je rêve, je parle de mes émotions de lectures, avec des mots. Le plus objectivement possible. Honnêtement, avec respect. Poussez la porte. Soyez les bienvenus dans mon univers littéraire.

    Je suis tout à fait d’accord avec toi. L’enquête n’a que peu d’importance, contrairement à ce qu’il dit autour de ça.

  4. Nath - Mes Lectures du Dimanche – Livres, ongles & Rock 'n Roll

    J’avais adoré de bonnes raisons de mourir et immédiatement ajouté celui-ci à ma PAL mais, après ton avis, je pense que je ne vais pas l’en sortir tout de suite. J’ai besoin d’autre chose en ce moment. Il sera là quand j’estimerai le moment venu.

Rétroliens

  1. Personne ne meurt à Longyearbyen – Morgan Audic – Amicalement noir

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