Veiller sur elle – Jean-Baptiste Andrea

Veiller sur elle, mais qui est-elle ? Jean-Baptiste Andrea va apporter des réponses étonnantes dans un roman qui touche au sublime.

Dans la vie, nous ne partons pas tous avec les mêmes cartes en main. Certains se retrouvent avec un jeu bien pauvre, mais parviennent à en tirer davantage que des coups d’éclat, à sublimer leur main.

Lien indéfectible mais précaire

C’est le cas de Mimo qui semblait devoir croupir dans l’indigence toute son existence, sauf qu’il a de la magie et du génie en lui. Et ça, il ne le doit à personne (si ce n’est à son père qui lui a appris les rudiments de la sculpture avant de disparaître).

Il y a Viola, l’opposée en matière de « chance », fille de bonne famille, de celles qui ont du pouvoir autant que de l’argent. Elle vit pourtant dans un carcan, à une période où les femmes ne peuvent imaginer sortir de leur sujétion sociale.

Tout les oppose, rien ne devait les faire se rencontrer. Et pourtant, un lien aussi précaire qu’indéfectible va les lier. Paradoxe d’une histoire qui transcende l’amour, comme un fil rouge qui va traverser les décennies et deux guerres.

Cette aventure humaine débute à l’orée du XXe siècle, dans une Italie rurale, pour se prolonger jusqu’aux années 80 dans les arcanes du Vatican. Comment un petit sculpteur indigent va-t-il devenir l’un des plus grands talents que le monde ait connus, et comment une femme à la destinée toute tracée parvient-elle à imposer sa nature ?

Génie et magie

Un homme touché par la grâce, une femme debout (comme elle se décrit elle-même). Deux êtres qui croient en leurs destins, quel que soit le prix à payer (et il sera élevé).

Quand on parle de génie et de magie, voilà deux mots qui conviennent parfaitement à la prose de Jean-Baptiste Andrea. Sa plume et sa manière de façonner des personnages touchent véritablement au sublime.

Ce roman est poignant au possible, bouleversant, follement romanesque. Et empreint de mystère. Tant d’ingrédients précieux qui en font un livre qui laissera des traces indélébiles.

À l’image de ses deux personnages principaux, comme on en rencontre que très rarement, si bien campés et caractérisés qu’on croit en eux, qu’ils prennent vie dans notre esprit. Croyez-moi, ces êtres de papier vont rester en vous à jamais.

Failles

L’auteur prend la place, 580 pages d’émotions, de grâce, de douleurs et de fureur, sans l’ombre d’une longueur. Une histoire racontée de manière si prenante qu’on la suit les yeux et l’âme grands ouverts.

Dans cette Italie qui voit la montée du fascisme, les deux personnages vont tenter d’exister par leur personnalité et leur folie. Un récit qui les montre sans fard, à travers leurs nombreuses failles. Un homme qui risque de se perdre dans son succès, la flamme d’une femme hors norme qui menace de s’éteindre.

Deux vies tumultueuses, deux protagonistes qui marqueront leur différence. Pour tenter d’être libres. Comme le dit l’auteur : « Toute frontière est une invention, il suffit de croire ».

Habité

Jamais cette histoire d’amour ne sombre dans le sirupeux, elle est au contraire vraiment atypique. L’écrivain parvient à sculpter une œuvre unique à travers ces deux existences ; astres brillants mais vacillants dans un ciel d’obscurité.

Jean-Baptiste Andrea a de l’or entre les doigts, littéralement habité par ses personnages et sa fresque grandiose. A proposer tant de passages merveilleux et justes qu’on a envie de prendre des notes, encore et encore.

Final et frissons

Comme cette définition de l’art de Mimo : « Sculpter, c’est très simple. C’est juste enlever des couches d’histoires, d’anecdotes, celles qui sont inutiles, jusqu’à atteindre l’histoire qui nous concerne tous, toi et moi et cette ville et le pays entier, l’histoire qu’on ne peut plus réduire sans l’endommager. Et c’est là qu’il faut arrêter de frapper ».

Jusqu’à une fin incroyable, qui donne tout son sens à ce récit et au mystère qui plane sur ces pages. Un dénouement qui donne des frissons.

Veiller sur elle est de ces livres rares, formidablement romanesques, lumineux, au service de personnages si forts qu’il est impossible de ne pas les sentir vivants. Jean-Baptiste Andrea insuffle un vent de liberté à travers ce texte inoubliable, transpercé par tant d’émotions. Grandiose.

Yvan Fauth

Sortie : 17 août 2023

Éditeur : L’iconoclaste

Genre : fresque romanesque

Prix : 22,50 €

4ème de couverture

Au grand jeu du destin, Mimo a tiré les mauvaises cartes. Né pauvre, il est confié en apprentissage à un sculpteur de pierre sans envergure. Mais il a du génie entre les mains.

Toutes les fées ou presque se sont penchées sur Viola Orsini. Héritière d’une famille prestigieuse, elle a passé son enfance à l’ombre d’un palais génois. Mais elle a trop d’ambition pour se résigner à la place qu’on lui assigne.
Ces deux-là n’auraient jamais dû se rencontrer. Au premier regard, ils se reconnaissent et se jurent de ne jamais se quitter. Viola et Mimo ne peuvent ni vivre ensemble, ni rester longtemps loin de l’autre. Liés par une attraction indéfectible, ils traversent des années de fureur quand l’Italie bascule dans le fascisme. Mimo prend sa revanche sur le sort, mais à quoi bon la gloire s’il doit perdre Viola ?

Un roman plein de fougue et d’éclats, habité par la grâce et la beauté.



Catégories :Littérature, Livre : les incontournables

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22 réponses

  1. Collectif Polar : chronique de nuit – Simple bibliothécaire férue de toutes les littératures policières et de l'imaginaire.

    Je n’au lu que son premier roman “Ma reine” que j’avais beaucoup aimé d’ailleurs.
    Mais là j’avoue tu me donne terriblement envie d’y retourner ! 😉 😀

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Et je suis certain que tu adorerais !

  2. Matatoune – Retraitée, je profite de ce nouveau temps libre pour lire, visiter et voyager et comme j'aime partager, j'ai créer ce blog : vagabondageautourdesoi.com. Venez y faire un tour !

    Décidément que des éloges de celui-ci. Je le note !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      c’est donc qu’il le vaut bien ! Je ne pensais pas le lire au départ, j’ai suivi le conseil avisé (et insistant) d’Aude bouquine, et que j’ai bien fait !

  3. Sublime et grandiose ta chronique. Merci à toi 🙏

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Merci à toi pour ta présence !

  4. Tu sors de ta zone de confort, et ça te réussit !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      J’ai décidé de ne plus avoir de zone de confort 😉

  5. Pour la plus grande joie de nos Pal, qui vont crouler de plus belle !

  6. Aude Bouquine – « Lire c’est pouvoir se glisser sous différentes peaux et vivre plusieurs vies. » Ici, je lis, je rêve, je parle de mes émotions de lectures, avec des mots. Le plus objectivement possible. Honnêtement, avec respect. Poussez la porte. Soyez les bienvenus dans mon univers littéraire.

    Grandiose oui ♥️. Je ne m’attendais pas à un tel texte. Tu lui rends parfaitement hommage. Cette histoire est magnifique.

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Je l’attendais encore moins que toi ! Et je te dois entièrement cette immense émotion de lecture, donc merci de ton conseil avisé 😉

  7. belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

    ok, tu le vends si bien qu’on n’a qu’une seule envie : le lire et vivre les mêmes émotions que toi 🙂

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      J’espère que ça sera le cas !

      • belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

        Moi aussi ! 🙂

  8. Je viens de le commencer.Suite à votre commentaire je suis très contente de l’avoir choisi pour le présenter à la rentrée au club de lecture.
    J’ai beaucoup aimé également des diables et des saints

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Voilà quoi me fait plaisir ! Bonne suite de lecture ! Bonnes lectures au club

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  1. Veiller sur elle – Jean-Baptiste Andrea – Amicalement noir
  2. Veiller sur elle, Jean-Baptiste Andrea, L'Iconoclaste, Avis lecture
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