Il faut beaucoup aimer les gens en cette période où les crises les éloignent les uns des autres.
Il faut vraiment beaucoup aimer les gens, dans une société de plus en plus individualiste.
Photos volées
Solène Bakowski, les gens, elle les aime à coup sûr. Même les invisibles, ceux qui ont une histoire cachée, ceux qui méritent bien mieux que leur sort.
Comme les SDF, qui souffrent et parfois meurent dans l’indifférence presque générale. L’autrice va se pencher sur le destin (le corps…) d’une de ces personnes, à travers les yeux et la volonté acharnée d’un ex-taulard. Qui va tout faire pour découvrir qui était cette vieille dame morte qu’il a découvert sur le trottoir quand il avait à peine 11 ans. Son premier mort, pas le dernier.
Au départ, sa quête est plutôt égoïste, mélange de culpabilité et de recherche de rédemption. Jusqu’à ce que la silhouette floue de cette morte prenne des contours de plus en plus précis, qu’elle prenne corps mais aussi âme, que sa transparence prenne de l’épaisseur.
Il faut dire qu’il doit se racheter d’une action qu’il a commise gamin, lorsqu’il a volé le porte-monnaie et des photos de la main de cette sans-abri.
La voie des autres
Pour arriver à ce petit miracle, il n’y a qu’un seul bon chemin : les autres. Hasard ou destin, l’écrivaine va tisser des liens entre des personnes qui n’avaient normalement pas de raison de se croiser. Un lien particulièrement, avec celle qui a pour nom Rosa et qui, par son parcours, a réuni des gens, avant de finir seule.
Eddy part donc à la recherche de ce passé, pour rendre à cette femme l’histoire qui s’est effacée, à l’aide de ces photos qui ressurgissent.
Eddy s’est aussi senti motivé par La Voix. Celle de Luciole qui berce ses nuits de veilleur, celle qui est là pour écouter la solitude des autres dans son émission de radio.
Son enquête tourne vite à la mission, un vieux magnétophone à la main pour enregistrer les paroles des personnes qui ont côtoyé Rosa, des décennies auparavant.
Hasard ou destin
Ses enregistrements se transforment en une sorte de jardin du souvenir, et sa recherche en devoir de mémoire.
On retrouve la sensibilité de l’autrice rencontrée dans Rue du Rendez-Vous, son précédent livre. Avec comme point commun ce hasard / destin et ces circonstances qui font s’unir des personnes qui n’ont rien en commun au départ.
Avec beaucoup de cœur et une grande générosité, elle reconstruit des vies passées (et présentes) par la grâce de ce qui est un don de plus en plus rare de nos jours : l’écoute. Parce que, quand on prête l’oreille, on prête attention, alors les gens (et les vies) se dévoilent. Surtout entre cabossés.
Cette histoire a ce charme désuet d’un passé révolu, mais qui peut aider le présent. Usant d’un ton doux-amer aussi, qui se veut positif mais lucide. Rien d’extravagant, juste des existences pas faciles qui sont mises en avant.
Et ces rencontres qui ont de quoi bouleverser des vies.
Il faut beaucoup aimer les gens met en lumière ces personnes de l’ombre. Mais qui ont aussi une vie, des émotions, des valeurs. Solène Bakowski les raconte avec pudeur, et une profonde et touchante humanité.
Lien vers mon interview de Solène Bakowski au sujet de ce roman
Yvan Fauth
Date de sortie : 05 mai 2022
Éditeur : Plon
Genre : Roman
4ème de couverture
Après un séjour en prison, Eddy Alune, 31 ans, est devenu veilleur de nuit, un métier qui lui permet d’échapper aux gens et aux ennuis. Il vient de perdre son père. En vidant l’appartement de son enfance, il retrouve des effets personnels qu’il a volés, vingt ans plus tôt, à proximité d’une SDF morte dans la rue. Poussé par la culpabilité, il décide de rendre à cette femme l’histoire qui lui a été confisquée.
Une enquête commence, dans laquelle Eddy se lance magnétophone à la main, pour ne rien oublier. De rencontre en rencontre surgissent plus que des souvenirs. Des liens nouveaux se tissent et la mémoire, ravivée par Eddy, va bouleverser bien des vies.
Il faut beaucoup aimer les gens trace le parcours d’un homme ordinaire qui, voulant réparer ses fautes, se trouve réparé par les autres. Ce roman pudique et profondément humain dessine les contours extraordinaires des visages qui font notre quotidien.
Catégories :Littérature
❤️
J’aime beaucoup l’auteure, je note pour une période où je serai disponible pour son humanité 😊
il peut justement aider à s’en rapprocher un peu
Je devrais être plus accessible dans quelques semaines, là je suis lessivée par des travaux qui n’en finissent pas… mais je vois enfin le bout, Solène sera un petit rayon de fraîcheur bienvenu !
Je suis dedans