Liberté, ma dernière frontière – Zazai et Julie Ewa

On n’est pas dans la fiction. Zazai existe, son parcours, il l’a vécu.

Sept frontières, 6 000 kilomètres en 6 mois, à pied à travers les arides montagnes d’Afghanistan, ou encore en bus, caché dans un trou de la carosserie. Et puis le Pakistan, l’Iran, la Turquie, la Bulgarie, la Hongrie, l’Autriche, l’Italie pour enfin arriver en France.

On n’est pas dans la fiction. Celle qu’écrit habituellement Julie Ewa a toujours été fortement teintée de réalité par ses expériences de vie. La romancière s’est cette fois encore plus engagée, avec l’envie de mettre en lumière ceux de l’ombre, les pauvres, les indigents. Et nous montrer leur magnifique part d’humanité malgré les épreuves traversées.

15 ans, seul

Le livre se lit comme une fiction, parce que le talent de Julie Ewa est d’avoir raconté ce périple sans pathos et en recréant les dialogues échangés par les participants de cette expérience de vie. Ça se lit donc comme un roman, sauf qu’à chaque page on se remémore que tout cela est vrai.

Zazai avait 15 ans quand sa mère et son oncle lui ont demandé de prendre la route, seul, pour une destination inconnue. Son père se cachait des talibans, et lui risquait de se retrouver enrôlé de force dans cette « armée » de mort.

A cet âge-là, on ne demande rien d’autre que de passer du temps avec ses amis. La perte de l’innocence est brutale. Mais que faire à part suivre le vœu de sa famille qui a tout vendu pour pouvoir payer une fortune à un réseau de passeurs… ?

Le Game

Une telle vie n’est pas un jeu. Et pourtant, migrants et trafiquants d’humains appellent le passage d’une frontière le « game ».

Pour comprendre le monde et réhumaniser ce qui souvent n’est présenté que par des chiffres, un tel récit est important. A la portée de tous, qui devrait être lu par tous.

Pour comprendre et ressentir. A travers des petites choses qui égrainent ce périple terrible, qui font qu’on comprend vraiment ce qui est en jeu. L’empathie est là.

Avec aussi de rares moments positifs, comme de belles amitiés qui se tissent, même si elles sont souvent mises à rude épreuve.

Et parfois ce qui est vécu de pire ne se déroule pas obligatoirement loin de chez nous, le comportement de certains pays européens étant proprement ignoble. Et certaines situation ubuesques…

Ensemble

J’ai eu la chance de rencontrer Zazai et de l’écouter parler de son livre aux côtés de ses amis, dans le club house de son équipe de cricket à Strasbourg.

Son point de chute, là où il s’est créé sa deuxième vie, totalement intégré mais sans oublier ses racines. Il est aujourd’hui naturalisé français, travaille comme électricien, presque 10 ans après le départ de son pays.

Liberté, ma dernière frontière est une leçon. De vie, d’épreuves mais aussi d’espoir. Ce qui reste au final, c’est une grande admiration pour ce gamin devenu homme. Et aussi la démonstration que l’on peut tous y arriver, ensemble. Seulement ensemble.

Yvan Fauth

Date de sortie : 27 janvier 2022

Éditeur : L’Archipel

Genre : Histoire vraie

4ème de couverture

Menacé par les talibans, Zazai a fui l’Afghanistan lorsqu’il avait 15 ans. En traversant huit pays, il a mis plus de six mois à parvenir en France par l’intermédiaire d’un réseau de passeurs peu scrupuleux.

Qu’il fut long, le voyage de Zazai depuis Jalalabad. Tout commence un jour d’août 2013. Pour échapper aux talibans qui enrôlent de force les garçons à la sortie de l’école, ce fils de berger interrompt sa scolarité. Grâce à l’aide de son oncle, il est confié à des passeurs.
Départ dans la nuit, direction le Pakistan voisin. Pour sa famille, Zazai est l’espoir d’une autre vie. Un espoir qui va se transformer en calvaire.
Six mois pour rejoindre notre pays. Six mois de marche forcée, en file indienne, dans le désert ou dans la neige. Six mois de froid, de faim, de fatigue. De coups, de rançonnages et d’humiliations.
D’errance et de détours. D’amis perdus en route, de découragement.
Et, à chaque passage de frontière, le ” game ” : jeu dangereux, où l’on mise chaque fois sa vie. Mais, au bout du chemin, une terre où se poser et s’insérer, loin de la cruauté et de la persécution.
Prise d’otage, prison, squats sordides, camp de rétention, foyer pour mineurs… Zazai a connu toutes les stations de l’exil. Un ” migrant ” ? Non, un garçon de quinze ans, presque un enfant, déterminé à conquérir sa liberté. Son récit, authentique, est une leçon de vie et de volonté. Un voyage initiatique vers la fraternité.



Catégories :Littérature

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6 réponses

  1. belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

    Je l’avais déjà surligné, ayant envie de découvrir le périple de certains pour arriver chez nous. Dire que chez nous, certains ont hurlé aux privations de liberté et qu’on a parlé d’une jeunesse sacrifiée, alors que d’autres ont connu/connaissent la guerre, ce qui est bien plus terrible…

    Je le surlignerai deux fois plus fort 😉

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      oui ce livre remet les idée au clair, et le choix des mots doit se faire avec attention…

      • belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

        Le poids des mots, même, comme disait un magazine… :/

  2. Connaissant déjà Julie Ewa par ses deux premiers livres, je sais que sous le prétexte de romans, son but est de dénoncer ce qui se passe ailleurs dans le monde aussi bien qu’à nos portes. Je lirai bien évidemment celui-ci.

  3. Aude Bouquine – « Lire c’est pouvoir se glisser sous différentes peaux et vivre plusieurs vies. » Ici, je lis, je rêve, je parle de mes émotions de lectures, avec des mots. Le plus objectivement possible. Honnêtement, avec respect. Poussez la porte. Soyez les bienvenus dans mon univers littéraire.

    Ça doit être très émouvant comme récit

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Éclairant, surtout

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