Le sang des Belasko – Chrystel Duchamp

Est-il encore possible en 2021 d’écrire un thriller en huis clos, basé sur un genre de construction immortalisé depuis des décennies (on pense à Agatha Christie et ses Dix Petits Nègres, par exemple) ? Est-il vraiment pensable de proposer une telle intrigue sans tomber irrémédiablement dans le pastiche ou la copie ?

Pour ma part, je n’aurais pas misé une fortune sur ce pari-là, sans doute encore moins quand il s’agit d’un second roman. Tans pis pour moi (ou tant mieux pour le lecteur que je suis), non seulement le challenge est relevé haut la main, et Chrystel Duchamp réussit même à proposer un roman enthousiasmant de bout en bout !

Différent

Après un très bon premier thriller, L’art du meurtre, l’auteure aurait pu se reposer sur ses jeunes lauriers et ne prendre aucun risque. Ça ne semble pas être le genre de la maison Duchamp.

Non seulement ce second roman est très différent du premier ; histoire, ton, écriture ; mais il arrive à rendre l’intrigue moderne tout en restant volontairement classique. Hommage et ambition ne sont pas inconciliables.

Dès le premier chapitre, l’écrivaine m’avait dans sa poche. Original, bien vu et surtout magnifiquement bien écrit, une entrée de haute volée dans l’univers de la famille Belasko.

Dans cette main du jeu des sept familles, vous avez le père, qui vient de mourir et dont les enfants doivent découvrir son testament dans la Casa Belasko, étonnante bâtisse perdue au fin fond du sud de la France. La mère, suicidée quelques années plus tôt. Et la fratrie qui vient se partager le gâteau : trois frères et deux sœurs.

Problème : ils se détestent et ont tous des choses à reprocher à l’autre, de frère à frère, de sœur à sœur. Et puis, il y a la maison, qui joue un rôle important, et dans laquelle ils se retrouvent enfermés.

Réinvention

Je vais vous avouer deux choses : les histoires de famille commencent à me lasser, tournant souvent en rond. Chrystel Duchamp a pourtant réussi l’exploit de me passionner de bout en bout, phrase après phrase. C’est ça le talent !

Avec sa construction bien domptée, alternant les points de vue de la fratrie. Avec ses surprises qui sentent bon et jamais le réchauffé. Avec cette ambiance pesante et crédible, vraiment immersive. Avec une fin épatante, digne de clôturer un tel livre. Et surtout, par la grâce d’une belle plume.

Écrit différemment de son premier roman, on sent que l’auteure a soigné son écriture, travaillée et changeante selon le personnage qui raconte ou l’action qui se déroule. Je l’ai trouvée remarquable.

A suivre de près

L’écrivaine est amatrice de littérature de genres, ça se sent dans sa manière d’écrire et de penser son histoire tout comme ses personnages. Un vrai bonheur de sentir certaines références, et la manière de les avoir parfaitement digérées pour créer son propre terrain de jeu.

Les thèmes abordés sont universels, rancunes, colères, jalousies, pour une intrigue surprenante et des protagonistes vraiment bien dessinés, loin de tout manichéisme.

Le sang des Belasko coule le long des interstices de la Casa familiale. Chrystel Duchamp se sert de ce pigment pour dessiner une intrigue formidablement maîtrisée et des personnages complexes et déroutants. Un excellent huis clos qui assoit Chrystel Duchamp à la place des auteurs à suivre de près.

Lien vers l’interview de Chrystel Duchamp au sujet du “Sang des Belasko”

Yvan Fauth

Date de sortie : 14 janvier 2021

Éditeur : L’Archipel

Genre : Thriller / Roman noir

4° de couverture

Cinq frères et sœurs se réunissent dans la maison de leur enfance, la Casa Belasko, une imposante bâtisse isolée au cœur d’un domaine viticole au sud de de la France.

Leur père, vigneron taiseux, vient de mourir. Il n’a laissé qu’une lettre à ses enfants, dans laquelle sont dévoilés nombre de secrets.

Le plus terrible de tous, sans doute : leur mère ne se serait pas suicidée – comme l’avaient affirmé les médecins six mois plus tôt. Elle aurait été assassinée…

Au cours de cette nuit fatale, les esprits s’échauffent. Colères, rancunes et jalousies s’invitent à table. Mais le pire reste à venir. D’autant que la maison – coupée du monde – semble douée de sa propre volonté.

Quand, au petit matin, les portes de la Casa se rouvriront, un membre de la fratrie sera-t-il encore en vie pour expliquer la tragédie ?



Catégories :Littérature

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17 réponses

  1. Matatoune – Retraitée, je profite de ce nouveau temps libre pour lire, visiter et voyager et comme j'aime partager, j'ai créer ce blog : vagabondageautourdesoi.com. Venez y faire un tour !

    Ah oui, tout à fait, à suivre vraiment !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      On est d’accord 😉

  2. Contrairement à toi, je ne me lasse pas des histoires de famille (d’ailleurs je sors juste de “et les vivants autour ” de Barbara Abel),et celle-ci me fait déjà de l’œil! Deuxième chronique enthousiaste que je lis à son sujet, je prends !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      donc, il te faut y aller ! 😉

  3. Mon premier coup de coeur ! J’ai été scotchée du début à la fin ! Je l’ai chroniqué hier d’ailleurs.

  4. Non mais t’es casse-pieds, Yvan. Je n’ai ni le temps ni les finances pour faire des écarts de lecture, et toi, tu attires mon attention sur des livres que j’aurais totalement ignorés sans ton éclairage. Pénible, vraiment, hein 😉

    J’aime bien les huis clos familiaux, et j’aime encore plus les auteurs (contemporains ou non) qui se frottent à ce genre hyper codifié, qui osent passer après les grands maîtres du genre.
    Donc là tout de suite, je ne peux pas, mais celui-là, je me le note !
    Et donc, merci Yvan 🙂

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Pas ma faute. Va gueuler contre ces jeunes auteurs qui osent avoir du talent ! 😉

      • Ah non, mais eux, j’ose pas. D’abord, je m’en voudrais de leur couper l’herbe du talent sous le pied. Ensuite, vu comment ils sont doués pour imaginer des intrigues criminelles tordues, j’aurais peur de terminer en travaux pratiques !

        • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

          ahahah !

  5. Aude Bouquine – « Lire c’est pouvoir se glisser sous différentes peaux et vivre plusieurs vies. » Ici, je lis, je rêve, je parle de mes émotions de lectures, avec des mots. Le plus objectivement possible. Honnêtement, avec respect. Poussez la porte. Soyez les bienvenus dans mon univers littéraire.

    Ce roman est machiavélique et très très bien construit ! Impossible à lâcher! Je suis bien d’accord avec toi : une auteur à suivre de très près. J’ai d’ailleurs acheté le premier. Ta chronique lui rend bien hommage 😉

  6. Nath - Mes Lectures du Dimanche – Livres, ongles & Rock 'n Roll

    Superbe chronique qui rend hommage à ce roman qui ne l’est pas moins !

  7. Coucou. Je me le note 😁
    Merci beaucoup

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      t’as encore de la place dans ton cahier ? 😉

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