Il est de ces auteurs-là comme des très bons vins, rares et à déguster. Il est de Ces orages-là la même impression qui rend ce roman précieux.
Autre terrain
Sandrine Collette n’est pas du genre à se reposer sur ses lauriers. Son précédent roman, Et toujours les forêts, fut bardé de prix, dont celui du grand prix RTL-Lire. Il revisitait un concept post-apocalyptique en arrivant à le réinventer à la sauce Collette.
Ce nouveau livre n’a pas grand point commun avec son prédécesseur, nouvelle réinvention d’un thème qu’on penserait usé. Les romans psychologiques ont abusé des victimes de relations toxiques, au point de donner l’impression de lire des livres photocopiés.
Même si Ces orages-là empruntent ce terrain-là, le texte sort très vite du lot. Parce qu’il est inclassable, entre roman noir et récit intimiste. Par la grâce de cette écriture-là aussi, à nulle autre pareille.
Clémence est le genre de personnages qui s’imprime en vous. Vous la garderez à l’esprit et dans le cœur, tant son histoire, ses fragilités et son combat sont touchants au possible.
Relations toxiques
C’est un cas pourtant presque tristement « banal » de femme écrasée par son conjoint, dont la flamme intérieure est peu à peu éteinte par la manipulation et la violence psychologique (et parfois physique) de ce qui faut bien appeler un tortionnaire, bien sous tous rapports.
Une femme qui tente de se sortir de l’étau, seule, à se battre contre elle-même, à se violenter pour s’en extraire.
Avec cette écrivaine-là, les choses ne sont pas faites à moitié (sauf avec les poissons. Vous comprendrez l’allusion et le lien avec la couverture en le lisant). Certaines scènes sortent vraiment du quotidien d’un couple.
Imaginez-vous dans la tête de Clémence. Dans son esprit, au plus profond, touchant du doigt ses pensées et doutes les plus intimes.
En matière de plongée dans la psyché d’un personnage, c’est une expérience singulière, tant Sandrine Collette creuse au plus loin des ténébreux souvenirs et sombres réflexions de Clémence.
Au plus proche des ressentis
Ce rapport au plus proche des ressentis est tout simplement bouleversant. L’empathie ressentie est immense. Par les émotions, et en les analysant, l’auteure arrive à décortiquer un processus mental complexe et nous aide à comprendre. Avant de nous le faire littéralement ressentir dans notre chair.
Chère Sandrine Collette, immense Sandrine Collette, unique. Son écriture, sublime, est un cadeau humaniste. La noirceur de son propos donne du sens à l’humain, dans ce qu’il a de pire ou de meilleur, de plus vil ou de plus beau.
Merveilleuse et incomparable plume, que l’écrivaine façonne de livre en livre. Chaque phrase, chaque mot est pensé pour toucher. Quitte à aller au combat contre les mots (maux), pour en ressortir toujours en magnifique vainqueur.
Il n’y a qu’à voir la manière dont elle joue cette fois-ci avec les traits d’union, qui deviennent désunion. Je n’ai jamais lu ça, cette façon de les utiliser pour que le lecteur termine lui-même certaines phrases ; encore une autre manière de l’impliquer totalement dans la vie de Clémence.
Du grand art
Ce récit n’est pas du genre à accumuler les rebondissements, pas du style à surjouer les événements. Le personnage pourrait exister, son histoire aussi. L’exceptionnel vient de cette écriture et de cette identification au personnage, même si elle peut penser différemment de nous. Du grand art, toujours au plus près des émotions, provocant des réactions qui risquent de vous surprendre vous-même.
Ce roman est à part dans la bibliographie de l’écrivaine. Elle qui décrit souvent les grands espaces, qui met toujours la nature au premier plan ; protagoniste principal. Cette fois-ci c’est l’inverse, c’est de la nature humaine-même dont il s’agit, encore plus qu’à l’habitude.
Ces orages-là vont vous électriser. Enflammer vos sens et vos émotions. Sandrine Collette s’approprie l’histoire d’une relation profondément toxique pour décrire ses conséquences de l’intérieur, au plus juste, au plus humain. A travers une plume qui ne ressemble à aucune autre, belle et touchante à en pleurer.
Lien vers mon interview de Sandrine Collette au sujet de “Ces orages-là”
Yvan Fauth
Date de sortie : 06 janvier 2021
Éditeur : J.C. Lattès
Genre : Roman noir et blanc
4° de couverture
Clémence a trente ans lorsque, mue par l’énergie du désespoir, elle parvient à s’extraire d’une relation toxique. Trois ans pendant lesquels elle a couru après l’amour vrai, trois ans pendant lesquels elle n’a cessé de s’éteindre.
Aujourd’hui, elle vit recluse, sans amis, sans famille, sans travail, dans une petite maison fissurée dont le jardin s’apparente à une jungle.
Comment faire pour ne pas tomber et résister minute après minute à la tentation de faire marche arrière ?
Catégories :Littérature
Très bel hommage pour un roman très réussi et troublant…
j’y ai mis mes tripes et mon amour
Je n’ai pas lu ces précédents peu intéressée par les grands espaces. Je compte bien lire celui-ci, le sujet me concernant bien . En plus, elle va présenter son livre à Boomerang sur Inter ce matin . L’occasion de vérifier sa spécificité. Merci pour ce retour ! 😉
Tu rates quelque chose avec ses précédents, ce sont tout sauf juste des histoires de grands espaces ;-). Celui-ci te conviendra sans doute mieux. Merci à toi !
J’avais beaucoup aimé “juste après la vague”, et acheté le dernier l’année passée, mais je n’ai pas trouvé le moment propice à sa lecture. Donc à priori, je devrais attendre avant de m’offrir le nouveau, mais je ne suis pas réputée pour ma sagesse… 😏
pour la lecture, la sagesse n’a pas d’intérêt ;-). oui, ne passe pas à coté de l’une des plus douées actuellement
Je surveille cette sortie du coin de l’oeil, ressentir tes émotions suffisent à me donner envie de me précipiter chez mon libraire. J’ai découvert Sandrine Colette grâce à toi il y a quelques années.
Si c’est à en pleurer, il n’y a pas de doutes, il sera pour moi….merci pour ces belles émotions mon ami
Tu ne pourras rester insensible, mon amie, même si ce livre est bien différent des précédents
Mazette, the chronique. Il est sur ma whislit, je vais foncer l’acheter. Merci à toi Yvan pour ces mots sur les maux. 🙏❤️
Merci 😉. Oui, Sandrine Collette m’inspire, c’est un minimum d’essayer de bien rendre hommage à son écriture
Quelle superbe chronique !!! C’est une chronique faite avec tes tripes.
L’histoire me fait peur car je connais assez bien Clémence et je ne sais pas si je dois le lire ou l’éviter à tout jamais.
Gros bisous.
Oui, clairement avec les tripes !
Je ne sais pas quoi te dire pour la lecture, impossible de rester insensible
Merci beaucoup pour ton aide 🤣🤣🤣🤣🤣
C’est carrément une déclaration d’amour “littéraire” s’entend ! Depuis “Les nœuds d’acier” je ne rate pas une sortie de Sandrine Collette. Le seul roman où j’ai eu un peu de mal c’est “Après la vague”. Donc on va se jeter sur le petit dernier.
Merci pour la chronique, Bonne Année.
Tu as, raison, s’en est une 😉. Bonne future lecture!
Bonne Année Yvan,je n’avais pas encore eu l’occasion de te présenter mes vœux pour 2021 ! Je constate en tout cas que tu la démarre bien, avec cette magnifique chronique. Sandrine Collette fait partie de mes auteurs préférés, et j’ai déjà fait une demande d’acquisition pour ce roman auprès de ma médiatheque.
Je te souhaite de très nombreuses et belles rencontres littéraires (et pour nous aussi, du coup!)
Je te souhaite le meilleur pour cette année ! Oui elle démarre bien côté lectures
Je n’ai encore jamais lu l’auteure… Mais peut-être cette année 😉
Il le faut 😉. Je sais que son écriture te touchera
Merci Yvan 😉
Noté !! Je ne suis jamais déçue de ses romans 😉
Un commentaire sans blague, qui êtes vous ?? 😉
Tu l’as écrit avec ton cœur cette chronique
Superbe
Je pense que je vais courir l’acheter 🙂
Tu me connais bien 😉. Merci.
Sort pas tout de suite, c’est fermé !
eh bien, que d’éloges ! J’ai globalement aimé tout ce que j’ai lu de Collette, il n’y a qu’Animal qui m’a déçue mais elle va parfois trop loin, selon moi…
C’est exactement ça et bien plus encore