
C’est à la mode de coller une étiquette sur ce genre de romans noirs, pour le meilleur et pour le pire. Après la vague des thrillers psychologiques, place au thriller psychanalytique. Les mots ont un sens. Si on fait abstraction du fait que le personnage principal est psychothérapeute et non psychiatre et qu’on accepte ce raccourci, le catalogage reste assez juste.
Une fin… mais pas que
Une clinique psychiatrique un brin alternative, une jeune peintre mutique après avoir été déclarée responsable (mais irresponsable) du meurtre de son mari. Et le fameux psychothérapeute qui décide coûte que coûte de la sortir de son mutisme, au point d’en faire une affaire personnelle.
Nombre de thrillers tiennent par leur fin, surprenante, parfois au détriment du reste de l’histoire. Ce n’est pas le cas ici. Le final est effectivement assez renversant, mais ce serait injuste de passer sous silence les qualités du reste de l’intrigue.
Pour un premier roman, Alex Michaelides marque effectivement de nombreux points. Son cursus l’explique en partie : scénariste ayant étudié la psychanalyse et ayant bossé dans une clinique psy. Sauf qu’il faut y rajouter une vraie adresse narrative.
Sans grumeaux
L’écrivain britannique sait faire monter la tension, sans abuser des artifices. Il sait construire un récit prenant, sans imposer trop de retournements de situations, privilégiant l’atmosphère. Et il a un vrai talent d’écriture, une plume vive, alerte.
La construction narrative est joliment maîtrisée, lisse et sans grumeaux. La lecture s’en trouve vraiment addictive, même si l’auteur n’invente rien. Mais il a su rajouter des ingrédients qui font la différente et que la pâte monte.
Michaelides a saupoudré avec intelligence quelques pincées de psychanalyse (très) générale, intéressantes et poussant à la réflexion. Freud y est souvent cité, autant pour aller dans son sens que pour parfois le contredire. Ces passages, parfaitement intégrés dans l’intrigue, sont assez captivants.
Face-à-face
Et puis, il y a les scènes fortes décrivant la confrontation entre le psychothérapeute et sa patiente. Des face-à-face où le mystère plane. L’internée étant muette, c’est un joli exploit d’avoir réussi à rendre ces passages aussi remarquables, en faisant passer les émotions et l’échange à travers d’autres modes que la parole. Une belle créativité, ça tombe bien, le livre est également une ode à la création.
Dans son silence fait parler de lui, il a les qualités pour contenter les férus de thrillers comme ceux qui n’en lisent qu’épisodiquement. Une belle idée de départ, une bonne fin, une narration maîtrisée et subtile. Un thriller qui reste clairement en mémoire. Alex Michaelides a un talent indéniable et une capacité à fourvoyer le lecteur. L’avenir s’ouvre à lui, espérons qu’il n’est pas l’auteur d’une seule idée (on en a malheureusement connu d’autres).
Yvan Fauth
Date de sortie : 06 février 2019
Éditeur : Calmann-Lévy
Genre : Thriller
Traduction : Elsa Maggion
4° de couverture
Alice, jeune peintre britannique en vogue, vit dans une superbe maison près de Londres avec Gabriel, photographe de mode. Quand elle est retrouvée chez elle, hagarde et recouverte de sang devant son mari, assasiné, la presse s’enflamme. Aussitôt arrêtée, Alice ne prononce plus jamais le moindre mot, même au tribunal. Elle est jugée mentalement irresponsable et envoyée dans une clinique psychiatrique.
Six ans plus tard, le docteur Theo Faber, ambitieux psychothérapeute, n’a qu’une obsession : parvenir à faire reparler Alice. Quand une place se libère dans la clinique où elle est internée, il réussit à s’y faire embaucher, et entame avec elle une série de face-à-face glaçants dans l’espoir de lui extirper un mot. Et alors qu’il commence à perdre espoir, Alice s’anime soudain. Mais sa réaction est tout sauf ce à quoi il s’attendait…
Dans la veine de Mensonges sur le divan d’Irvin Yalom, un redoutable mélange de suspense et de psychanalyse qui ravira tous les lecteurs avides d’histoires prenantes.
Catégories :Littérature
Vraiment surprenant et c’est LE compliment Parce que à force de lire il est plus difficile d’être surpris. Prenant du debut à la fin.
Belle chronique Yvan,comme toujours.
Merci Kris, oui surprenant et bien fait. Une belle surprise
Je sens qu’il me plairaît bien celui là…
Je pense aussi 😉
Très belle chronique pour un roman qui a été pour moi un magnifique coup de coeur.
Encore une fois, Yvan, tu as su capter mon attention…et, moi qui suis toujours ravie de découvrir (et de faire découvrir aux lecteurs!) de nouveaux auteurs, je vais m’empresser de le glisser dans mon prochain panier de commandes, merci! 🙂
merci de ta curiosité et de ta confiance en tout cas, Magali. C’est bien ma vision du partage, comme une chaîne 😉
Tentant, en effet, même pour moi qui ne suis pas grande lectrice de thriller, bon week-end à tous
Je pense qu’il peut tout à fait plaire aux lecteurs occasionnels de thriller effectivement ! Bon week-end !
Dis-moi, ce thriller psychanalytique, il est remboursé par la mutuelle ?? 😆
Encore une bien belle découverte et dire que c’est un premier roman !