Le poids du monde – David Joy

L’auteur porte un patronyme trompeur. Ce n’est vraiment pas la joie dans ce trou perdu des Appalaches. Le poids du monde est un digne représentant de cette mouvance du rural noir qui déferle sur les USA.

Désespoir

Deux jeunes hommes, dans les 25 ans, davantage que des amis, mieux que des frères. Liés par leurs enfances difficiles. Dans ce coin des États-Unis, leurs liens auraient pu les sauver. Mais est-ce possible dans une région où les habitudes semblent immuables, et où la drogue fait des ravages sur un terrain dévasté par la crise des subprimes….

David Joy décrit ce pays profond, loin du rêve américain. Des vies tombées en décrépitude, en dégénérescence. Comment croire encore en l’avenir quand vous ne savez même pas comment aller au bout de la journée ? Comment trouver un sens à des existences qui se sont perdues en chemin ? Destins tout tracés, où la survie est le maître mot et le désespoir l’aigre soupe à avaler au quotidien.

Violence (jamais gratuite)

Ce roman est l’histoire de cet accablement, à travers trois personnages décrits sans manichéisme. Deux amis / frères qui dérivent vers les ténèbres, et la mère d’un d’entre eux qui tente de surnager. Ils traînent tous les trois de grosses casseroles dont les bruits résonnent en cascade. La pesante masse de leurs univers est un fardeau qui les tirent toujours plus bas, sans qu’ils ne demandent rien d’autre que de résister à une échéance fatale.

L’écrivain a un très joli talent pour créer décrire ces contrées désenchantées et ces personnages marqués au fer rouge. Sur 300 pages, il ne nous préserve de rien, ni de leurs passés meurtris, ni de la violence de leur quotidien. Souffrance, brutalité intrinsèques et extrinsèques (il faut dire qu’un des deux revient du Moyen-Orient et souffre de stress post-traumatique).

Saisissant

Certaines scènes sont particulièrement dures, sans que jamais l’auteur ne tombe dans la surenchère gratuite. Il faut dire que les rais de lumières sont tellement rares dans ces vies brisées qu’ils passent presque inaperçus.

Nous, lecteurs, sommes les témoins extérieurs de ces destins, nous détenons certaines clés que les protagonistes ne possèdent pas. Elle servent à entrevoir les raisons, mais surtout à ne pas juger trop facilement ces excès de violence, d’alcool et de drogues.

David Joy dépeint avec talent cette Amérique profonde en pleine déliquescence. Il brosse un tableau plus vrai que nature de ces destins brisés et de leurs descentes aux enfers. Il est difficile de survivre quand on à l’impression de devoir porter au quotidien Le poids du monde sur ses épaules. Violent et saisissant, voilà un roman noir qui vient des tripes et qui décrit parfaitement ce que peut être le désespoir.

Sortie : 30 août 2018

Éditeur : Sonatine

Genre : Roman noir

Traduction : Fabrice Pointeau

Ce que j’ai particulièrement aimé :

La plume de l’auteur, très expressive

La manière de mener l’histoire, prenante

L’atmosphère sombre, mais réaliste

4° de couverture

Après avoir quitté l’armée et l’horreur des champs de bataille du Moyen-Orient, Thad Broom revient dans son village natal des Appalaches. N’ayant nulle part où aller, il s’installe dans sa vieille caravane près de la maison de sa mère, April, qui lutte elle aussi contre de vieux démons. Là, il renoue avec son meilleur ami, Aiden McCall. Après la mort accidentelle de leur dealer, Thad et Aiden se retrouvent soudain avec une quantité de drogue et d’argent inespérée. Cadeau de Dieu ou du diable ?



Catégories :Littérature

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6 réponses

  1. brindille33 – J'aime la nature, les livres, romans, polars, la photo, la musique, cinéphile, les documentaires, autodidacte. Et l'informatique depuis sa naissance, où j'ai tout appris toute seule.

    Cela m’a l’air aussi sombre que l’endroit ? Je ne connais pas l’auteur. Aurais-je lu le même résumé chez Blacknovel1 ? Cela me dirait quelque chose ou pas. M’en vais mener mon enquête 😉 Merci à toi.

  2. lebouquinivre – Jeune femme de 26 ans, aimant la Vie (avec un grand "V"!) avec à la fois ferveur et abandon. Aux multiples facettes. Passionnée par les arts sous toutes leurs formes, je voue un culte à MUSE et à la musique, à Thilliez et aux bouquins, à Rimbaud et à sa prose, à Tom Hanks et au ciné... Une autre partie de moi idolâtre le FC Nantes et le football. Un bout de moi est implacable dans ses combats. Engagement et solidarité. Le cancer ne devrait pas exister, encore moins chez les enfants. D'ailleurs, je vous invite à soutenir "Imagine For Margo". Et Tom évidemment. Et enfin, comme le dit Sénèque: "Un bonheur que rien n'a entamé succombe à la moindre atteinte; mais quand on doit se battre contre les difficultés incessantes, on s'aguerrit dans l'épreuve, on résiste à n'importe quels maux, et même si l'on trébuche, on lutte encore à genoux." Comme dirait Bénabar, bien le bonjour Msieurs, Dames!

    J’ai très envie de le lire!

  3. belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

    Aaaah, cette Amérique profonde en pleine déliquescence ! Dieu que j’aime quand les auteurs en parlent aussi bien. Je ne me gargarise pas de la misère de certains, mais j’aime les ambiances particulières dans lesquelles baignent ces histoires.

    La preuve, je l’ai acheté 🙂 Merci de nous en parler si bien.

  4. On a adoré aussi. Des personnages bien troussés, l’intrigue addictive et la plume de l’auteur au cordeau. Pur plaisir!

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Tes mots sont un bon résumé !

Rétroliens

  1. David Joy – Le Poids du monde | Sin City

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