Interview – 1 livre en 5 questions : La police des fleurs, des arbres et de forêts – Romain Puértolas

1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre.

5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger.

ROMAIN PUERTOLAS

Titre : La police des fleurs, des arbres et de forêts

Sortie : 02 octobre 2019

Éditeur : Albin Michel

Lien vers ma chronique du roman

Tu nous surprends avec ce roman résolument différent de tes précédents. Comment t’es venue cette envie de plonger dans cette autre aventure ?

L’âge ! (rires). J’avais envie d’écrire des choses beaucoup plus littéraires. Je voulais passer à autre chose. Arrêter avec le loufoque, l’absurde. Je ne supporte plus d’entendre ces mots à mon sujet. Je voulais écrire des livres « normaux ». Enfin. Je me suis retrouvé coincé, moi aussi, dans une armoire Ikea et je voulais en sortir. Ce roman trouve sa genèse dans un malentendu. Comme quoi, sur un malentendu, ça peut marcher ! Ce roman a été écrit suite à un énorme malentendu. J’arrive dans un pays étranger pour une tournée, à l’aéroport je tombe sur le livre d’un inconnu placé en tête de gondole, on le voit partout. Une fois dans la voiture, curieux, je demande à mon accompagnant de qui il s’agit. Il m’apprend qu’il s’agit d’une célébrité locale et commence à me raconter brièvement son nouveau roman. Gros coup de foudre, je trouve l’histoire géniale. On me présente l’écrivain en question, je sympathise, je lui achète son livre, je me plonge dans la lecture dès que j’entre dans ma chambre d’hôtel et là… énorme ! Après cent pages, je m’aperçois que je n’ai pas du tout compris l’histoire ! Que j’en ai compris une autre ! Du coup, j’écris ce roman que j’avais compris !

Et puis, j’ai toujours écrit des manuscrits différents, sauf que mon éditeur ne les aimait jamais assez pour les publier comme mes romans « comiques ». Je suis heureux qu’Albin Michel m’ait donné l’opportunité de pouvoir montrer une autre facette à mes lecteurs.

Tu préviens le lecteur dès les premières lignes, c’est un roman Policier sans en être un…

Exactement. « Polar », un autre mot que je ne supporte pas. Je n’en lis pas. Dans mon roman, il y a bien un mystère, une intrigue policière, mais ce n’est pas un polar, ce n’est pas un roman policier. J’ai une vision plus romantique de l’enquête, une vision surannée. Il y a le style, d’abord, très littéraire, poétique. La narration est composée de lettres écrites à la procureur de la république dans lesquelles l’officier de police raconte son ressenti face à ce monde de la campagne qui lui est inconnu, son ressenti à l’encontre de cette atmosphère malsaine dans laquelle il évolue, avec ces gens étranges. Et puis il y a ce gigantesque coup de théâtre à la fin.

C’est une formidable plongée dans les années 60, et le milieu particulier de la campagne à l’époque…

Oui, j’ai adoré. Double dépaysement. Je suis 100% de la ville (je suis né à Montpellier, ai vécu à Marseille, Barcelone, Madrid), donc la campagne est forcément exotique pour moi. J’aime son rythme lent. Il n’y a rien à faire si ce n’est lire. C’est merveilleux. Et puis 1960, une année que je n’ai pas connue. Je suis né en 1975. Il m’a fallu tout réapprendre. Des cabines téléphoniques publiques aux voitures. C’est fou le nombre de choses qui n’étaient pas encore inventées en 1961 (tiens, rien que le sac en plastique ! Et le steak haché qui apparaissait juste !). Et puis le détail poussé à l’extrême de retrouver le modèle d’arme administrative de la police (le pistolet MAC50), le gyrophare de la police qui était alors orange et pas bleu ! Enfin, vraiment, je me suis énormément amusé sur ces détails.

Tu as choisi de raconter cette incroyable histoire à travers des échanges épistolaires…

Peu avant de me lancer dans l’écriture de ce roman, j’ai lu Le cercle littéraires des amateurs d’épluchures de patates (dont j’adorais le titre). Par contre, sa forme, épistolaire me rebutait et je ne me décidais pas à le prendre de l’étagère de ma bibliothèque. Et puis je l’ai lu en deux jours. Et je me suis dit « C’est possible ! ». J’ai pris ce risque moi aussi, d’écrire un roman entier sous cette forme, mais pas que. Il y a des choses écrites sur des emballages, du papier journal, des lignes écrites sur une Bible, les supports sont multiples. Mais comme cela menaçait le suspense, l’action, j’ai dû trouver un second artifice pour la narration. J’ai pensé que le policier pourrait avoir la manie d’enregistrer ses pensées sur un dictaphone. Manque de pot, en 1961, le dictaphone n’était pas encore inventé ! Alors j’ai pris un bon vieux magnétophone dans une sacoche en cuir. Le fait d’enregistrer les auditions en secret, de graver sur la pellicule les sons de la vie quotidienne, permettait de rentrer dans l’action, dans le présent, dans la vie vrombissante qui ne pouvait pas être exprimée au travers des lettres, un support bien trop fixe et sans vie.

C’est une sacrée prise de risque que d’affirmer, dès le début, que l’on va se faire avoir par ton récit (je suis tombé dans le panneau comme un bleu) ;-)…

Parce que j’en suis sûr. Statistiquement parlant (risque). Sur les dix amis qui ont lu la première mouture, seul un ami a trouvé le truc avant la fin et je peux te dire que c’est parce qu’il cherchait ! J’ai donc été assuré que le tour de magie fonctionnait. Vingt autres personnes, entre elles des éditeurs expérimentés, ont lu le roman et n’ont rien vu venir. Un sur trente, j’étais donc très confiant. L’introduction est un « copier-coller » de ce que je disais à mes amis avant qu’ils le lisent, en quelque sorte, pour éveiller leur intérêt, leur curiosité : « Tu vas voir, lis bien car il y a un gros coup de théâtre à la fin et tu vas te mordre les doigts d’être passé à côté durant toute la lecture ! ». J’ai fini par mettre cette accroche dans le dialogue initial. Allez, je vous avertis une dernière fois : Attention, regardez bien, parce que vous allez vous faire avoir, et même si je vous dis de faire attention, vous allez toujours vous faire avoir ! (rires) Et c’est ça qui est bon !

Yvan Fauth

Copyright photo : © Éric CLEMENT



Catégories :Interviews littéraires

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6 réponses

  1. A-t-on une explication plus fournie du non au polar exprimé par l auteur surtout s il n en lit jamais

    Je frey

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Il faut lire le livre pour comprendre 😉

  2. Excellente interview qui en dit long sur l’auteur ! Voilà quelqu’un qui a su sortir du cadre pour nous surprendre. Je me suis aussi faite avoir (et j’ai adoré ça !!)

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      exactement ! Bravo à lui pour ne pas vouloir se laisser enfermer et bravo de nous avoir roulé dans la farine 😉

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