1947, les arméniens sortent d’un enfer pour plonger dans un autre.
Le chant d’Haïganouch est la suite directe de L’Oiseau bleu d’Erzeroum, le premier roman qui avait permis à Patrick Manoukian alias Ian Manook de fictionner ses racines.
Avec ces deux livres, il nous raconte l’histoire de ses grands-parents, ainsi que de ceux qui ont gravité autour d’eux. Des vies remplies de tragédies terribles, qui avaient débuté de la pire des manières.
Terrible désillusion
Après le génocide turc autour de 1915, place à l’URSS d’après la seconde guerre mondiale.
Staline disait cyniquement que « La mort d’un homme est une tragédie. La mort d’un million d’hommes est une statistique ». Les personnages du roman vont expérimenter les conséquences terrifiantes de cette politique.
L’espoir était pourtant de mise au sortir de la guerre, les familles avaient trouvé leur place en France. Et voilà que les soviétiques leur proposent un mirage : créer une nouvelle terre promise arménienne. La suite sera pire qu’une désillusion, un autre brasier de douleurs qui se formera dans la glace russe.
Mais ces romans tiennent davantage de la saga familiale que d’une saga historique.
Universel
Ce deuxième volet est différent du premier, dans le sens où il se focalise étonnement sur Agop, le copain à la vie à la mort de son grand-père, et sur Haïganouch, la petite sœur de sa grand-mère.
Tous deux se trouvent sur les immenses terres russes, pour des raisons différentes. Mais ils vont chacun de leur côté connaître la déportation et l’inhumanité à grand échelle du système soviétique.
Les deux pieds dans l’absurdité totale de ce système, et une situation horrifiante qui dépasse le sort même des arméniens.
C’est à nouveau un livre à lire pour comprendre, pour s’émouvoir, pour se laisser porter par des personnages marquants. Des vies qui pourraient être tristement banales, mais qui s’avèrent des destins extraordinaires. Et pour l’auteur, rendre des histoires personnelles universelles.
Transmission
Un récit qui sert de transmission, basée sur les souvenirs racontés par les grands-parents. Et qui contribue au devoir de mémoire, d’autant plus de nos jours où on recommence à jouer le même genre de partitions mortifères.
Mais le roman reste avant tout une vraie aventure humaine, avec un Manook qui habite ses personnages. Un récit fait de petits-riens qui constituent un tout, au plus près des protagonistes. Un enrichissement.
C’est un deuxième livre, la surprise est moins prégnante, mais le ressenti de lecture toujours touchant. Toujours révoltant.
La plume de l’auteur est là pour raconter ces destins. Pour nous faire aimer ces personnages. Pour imaginer et imager la réalité. Pour dire l’innommable ou même pour appuyer avec virulence sur la responsabilité de la France.
Le chant d’Haïganouch est un deuxième volet toujours au plus près de l’humain, même dans les pires horreurs. Avec un Ian Manook qui se donne et qui donne.
Lien vers ma chronique du premier roman “L’oiseau bleu d’Erzeroum”
Yvan Fauth
Sortie : 29 septembre 2022
Éditeur : Albin Michel
Genre : Histoires vraies et fiction historique
4ème de couverture
Ils en rêvaient : reconstruire leur pays et leur histoire. Comme des milliers d’Arméniens, Agop, répondant à l’appel de Staline, du Parti Communiste français et des principales organisations arméniennes de France, quitte sa famille et embarque en 1947 à bord du Rossia dans le port de Marseille. Mais au bout du voyage, c’est l’enfer soviétique qu’il découvre et non la terre promise.
Sur les bords du lac Baïkal, Haïganouch, une poétesse aveugle, séparée de sa sœur lors du génocide de 1915, aujourd’hui traquée par la police politique, affronte elle aussi les tourments de l’Histoire.
Des camps de travail d’Erevan aux goulags d’Iakoutsk, leurs routes se croiseront plus d’une fois, au fil d’une odyssée où la peur rencontre l’espoir, le courage et l’entraide. Agop et Haïganouch parviendront-ils à vaincre, une fois de plus, les ennemis de la liberté, pour s’enfuir et retrouver ceux qu’ils aiment ?
Après le succès de L’oiseau bleu d’Erzeroum (lauréat des Trophées littéraires des Nouvelles d’Arménie magazine), Ian Manook signe une nouvelle fresque familiale bouleversante et une saga historique tumultueuse, hymne à la résistance et à la mémoire d’un peuple.
Catégories :Littérature
L’oiseau bleu d’Erzeroum m’avait bouleversée, il FAUT que je lise sa suite.
Je me demande si ces pauvres Gens trouveront un jour un endroit où ils auront la paix.
Arménie, ça me fait à Aznavour et tremblement de terre, qui avait fait tant de victimes. Je donnais à manger à mon fils qui était assis dans sa chaise bébé et je pleurais en même temps en pensant à ces enfants qui n’avaient rien à manger ou plus de parents. Il est sur ma whislist.
Merci à toi Yvan. ❤️
oui c’est déchirant… Merci à l’auteur de nous faire partager ces vies et cette mémoire
Très belle chronique pour ce deuxième opus qui m’a moins touché. Je vais essayer de le reprendre.
J’ai hâte de le lire tant j’avais aimé le premier tome. .