1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre
5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger
ROMAIN PUERTOLAS
Titre : Sous le parapluie d’Adélaïde
Editeur : Albin Michel
Sortie : 30 septembre 2020
Lien vers ma chronique du roman
Comme ton précédent roman, tu nous proposes une sorte d’enquête, pourtant loin des codes du polar…
Les codes du polar, j’en suis bien loin, effectivement, car je ne les connais pas. Je ne lis pas de polars. Je n’aime d’ailleurs pas ce terme, il faut dire que je déteste l’argot. Je lui préfère l’appellation de roman policier, et, dans mon cas, le terme de policier littéraire, car il y a une grande recherche du style, du mot. L’enquête n’est pas le plus important, comme en témoignent ces 50 pages sur la relation de couple entre Rose et Christian, la victime et son mari. J’aime les enquêtes qui prennent leur temps, et qui ont ce style désuet, vieille France, que j’avais déjà exploré dans La police des fleurs, des arbres et des forêts.
Donc, au lieu de dire que je me situe loin des codes du polar, nous pouvons dire, assurément pour ce livre, que je me situe loin des codes d’un roman de Puértolas. Il y a une fracture nette avec tout ce que j’ai écrit auparavant. Pas d’humour, pas de fantaisie, pas de loufoque (mot que j’ai appris à détester). Il y a un roman fort, porté sur l’émotion et les mots. Une histoire qui trouve ses racines dans un évènement triste et mystérieux de ma vie, la mort tragique de ma tante. Le tout mêlé de thriller, d’enquête et avec, bien entendu, un énorme twist à la fin.
Peut-on dire que tu utilises un peu des ingrédients « à l’ancienne » pour raconter ton histoire, alors que beaucoup tentent aujourd’hui de se copier à vouloir sonner « moderne » ?
Oh oui, à l’ancienne, comme la moutarde Maille. Retourner dans un monde qui prend son temps. Plus de téléphones mobiles, d’ordinateurs, de choses qui vont à 100 à l’heure et nous écartent de la vraie vie, simple, la contemplation de la mer ou l’écoute de la campagne. Chaque fois que je me retrouve dans un lieu sans connexion, perdu au fond du monde, j’ai une histoire, un scénario, un roman qui naît aussitôt. Mais oui, on est loin des polars avec de jeunes officiers de police, cow-boys des temps modernes en blouson en cuir, dégainant au moindre bruit. Il n’y a pas de policier dans ce roman, mais une avocate qui enquête. Dans mes romans, un flic qui dégaine est un échec. Il doit y avoir de l’action mais je hais le saute-dessus.
Cette fois encore, le lecteur sent très vite que tu mets en place les pièces du puzzle, tout en faisant tout pour le tromper et le surprendre au dernier chapitre…
Écrire en connaissant la fin, voilà une nouveauté chez moi, et Dieu que c’est jouissif de pouvoir jouer sur les mots, les situations, écrire avec des pincettes, tout dire sans le dire, pour que le lecteur croit, lui-même, quelque chose et se trompe autant lorsqu’arrive la fin. Sans jamais mentir, ni omettre pour que le lecteur courageux puisse entamer une seconde lecture immédiatement et se dire « mon Dieu, tout était là, devant mes yeux ». Je n’ai jamais rien écrit d’aussi compliqué.
Tu réinventes aussi ta manière d’écrire, de conter…
Il y a maintenant une recherche du style, de la belle phrase, des jolis mots. Il y a aussi énormément de travail sur l’intrigue, c’est un puzzle énorme que je mets en place. Il faut savoir que cette grande histoire est une trilogie et que j’ai dû écrire les trois romans en même temps afin de ne pas commettre d’erreurs. Ce sont des livres indépendants, avec un grand twist à la fin de chacun, mais il y a une récompense pour le lecteur fidèle de la trilogie, à savoir une myriade de petits twists et rebondissements sur plusieurs générations et endroits que seul lui pourra voir.
Les surprises, oui, mais surtout une galerie de personnages touchants (et là on s’éloigne clairement du principe de l’enquête)…
Des personnages, pour le coup, issus du réel. L’histoire à peine romancée de ma tante et de mon oncle. Tragique dans la vie réelle, tragique dans le roman. J’ai pris énormément de plaisir à recréer leur vie (elle intervient dans la 4ème partie). C’est une sorte de respiration dans l’enquête. Une respiration angoissante, suffocante, car on y narre les origines du mal.
Catégories :Interviews littéraires
Hello Ivan.
Juste parce que ça me semble important, j’apporte une petite précision sur le mot « polar » qui ne sied pas à Romain Puertolas
ce n’est pas de l’argot quand il est utilisé pour définir le genre littéraire. Il est familier tout au plus.
En revanche, il est qualifié d’argot quand il definit ces étudiants focalisés uniquement sur leur étude.
A bientot
Yvan avec un Y 😊
Encore plus intriguant là ! 😛