1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre.
5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger.
ISABELLE DESESQUELLES
Titre : UnPur
Éditeur : Belfond
Sortie : 22 août 2019
Lien vers ma chronique du roman
On parle de littérature blanche, mais ce livre est aussi un vrai roman noir…
Oui. Trois fois oui. Je l’ai écrit volontairement ainsi, avec le procès, les flashbacks, le mal, regardé droit dans les yeux. Et l’agneau sacrifié. Ceci posé, il n’y a qu’une chose qui compte, l’écriture. Et ici ce carambolage entre le terrible et la douceur inentamée et violée. Dans UnPur on colle à la peau d’un qui perd tout. Plus que lui-même. J’aime souffler le chaud et le froid, jouer de cette frontière mouvante du réel et de la fiction et que tout soit vrai dans le sens de juste. Tenter de l’écrire, au point que le lecteur en soit foudroyé. Quand je lis je recherche cela, et j’ai essayé de le procurer à ceux qui ouvriront ce livre. Les photos en noir et blanc laissent une empreinte plus forte, non ? Elles nous racontent davantage.
Roman de l’inavouable, dissection d’un tabou, UnPur est noir et blanc jusque dans son titre. En un mot ou deux mots ? Je n’ai pas voulu trancher, la réponse est à la fin du livre. Et ce mot inventé en est la clé.
Le sujet de ce nouveau roman est difficile, ça vous a inquiété au moment de vous y lancer ?
Non pas d’inquiétude, pourtant, intranquille je le suis ! Plutôt une certitude. Écrire cette voix. Elle était là, tapie en moi, attendant son heure, elle me soufflait tout, de mes actions, de mes lectures, de mes émerveillements, et de ma peur. Cette voix est le fantôme d’un pauvre enfant que j’abrite et qui m’abrite. Je viens de lire ces mots de Malcom Lowry à propos de Sous le volcan « C’est l’effroi qu’inspirent à l’homme ses propres forces intérieures. C’est aussi sa culpabilité, son remords, sa lutte incessante vers la lumière sous le poids du passé, sous l’emprise du destin ». Effroi, force, culpabilité, lutte, une lumière, et le passé, il y a là tout pour écrire. Et le destin, ah le destin… une argile infinie, ou plutôt une boue, et j’aime mettre les mains dans la boue.
L’enfance, une fois de plus, est omniprésente dans ce récit…
Garder ce qui disparaît, c’est l’œuvre d’une vie. C’est notre enfance. Plutôt qu’un extrait au dos du livre, j’ai souhaité que l’on écrive ces deux phrases, elles contiennent tout le texte et certainement, me contiennent toute.
J’aime les mots qui en disent long. Garder, au sens de retenir mais c’est aussi protéger. Alors garder, oui, l’innocent que l’on a été, pour toute la vie comme les enfants aiment à le croire.
Chaque fois avant de commencer un livre, j’essaye de ne pas reprendre ce sentier qui m’entraîne vers l’enfance, celle de Jane Eyre, celle de David Copperfield, celle de L’histoire de Bone, ou des deux gamins de Jeu Blanc et Les étoiles s’éteignent à l’aube, superbes romans de Richard Wagamese. Mais immanquablement ce qui grandit en moi, sans pouvoir m’en détourner, c’est cette poignée d’années. Son absolu, ses premières et bien plus ses dernières fois. Avec cette question lancinante de la lézarde, une fêlure : Peut-on être heureux après le malheur ? Comment vivre pour qu’après ne soit pas qu’un avant.
On est au plus près du ressenti du personnage principal. Mais vous avez également tissé une vraie intrigue et une formidable fin…
La lectrice que je suis aime le suspens, et la personne que je suis aime à faire des surprises, les mettre en scène. Tous les jours ou presque, dans la vie réelle ! Alors quand il s’agit d’écrire, le naturel reprend le dessus.
Accorder à l’histoire toute sa place, aux rebondissements, au mystère aussi, surtout. Que le lecteur entre dans le livre, avec sa propre histoire, ses souvenirs, ses craintes et ses espoirs, qu’à son tour il s’empare de ce qu’il lit, qui devient lui.
Le moteur narratif assumé d’UnPur est ce que l’on redoute le plus. Et va de pair avec un secret au creux des pages et que son héros porte en creux.
J’aime les films de procès, les enquêtes, et comme nombre d’entre nous, j’aime le trouble que suscite le crime, le grand écart, attirance et répulsion. Et certainement aussi j’aime être hantée.
Et puis il y a l’émotion, un frémissement que je recherche, qui me dicte tout ou presque. La palette infinie de nos émotions. S’abandonner à elles quand j’écris, s’y livrer poings liés. On ne possède pas un livre, c’est lui qui nous possède.
Vous portez beaucoup d’attention à votre écriture, souvent poétique, parfois crue…
Cru, je ne sais pas, même si c’est un mot que j’aime, là encore il porte en lui plein de possibles. Une écriture frontale, volontiers brutale, oui. Peut-être parce que c’est ainsi que je réfléchis, je dirai, farouchement.
La poésie… La poésie, elle, me laisse sans mot, elle donne tout. La sensation. Sensation d’exister. Et que ce n’est pas fini.
Yvan Fauth
Catégories :Interviews littéraires
Très bel échange, merci Yvan!
Oui c’est un échange fort en émotions
très intéressant, je ne connaissais pas du tout cette auteure.
On est très loin du thriller, c’est pour ça 😉
C’est vrai mais parfois quand tu découvres un auteur et que ça t’accroche, ça te donnerait presque encore de le découvrir même si ce n’est pas ton genre de prédilection 😊
Curieuse chose que le hasard… Je me titillais le neurone devant les bouquins de Richard Wagamese. D’un côté ils m’attirent, de l’autre j’ai déjà une PàL qui dégueule de tous les côtés. Si la dame dit qu’ils sont superbes alors la curiosité prendra le dessus sur la raison.
le hasard fait parfois bien les choses, hein ! 😉