Interview – 1 livre en 5 questions : Fantazmë – Niko Tackian

1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre.

5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger.

Niko Tackian

Titre : Fantazmë

Éditeur : Calmann-Lévy

Sortie : 04 janvier 2018

Lien vers ma chronique du roman

Fantazmë est un vrai polar, noir et violent, mais fort en émotions également…

Oui c’est certainement le polar le plus polar de tout ce que j’ai écrit. Et c’est un genre dans lequel il y a une certaine nécessité de réalisme, or pour moi, notre époque est violente, noire et particulièrement cynique. Et puis le commandant Tomar Khan est né des ruines du bataclan et des victimes des attentats de novembre 2015, le monde est devenu plus réel, nous avons subitement pris conscience de la fragilité de notre sécurité et de ceux qui l’assurent. Et il est sans concessions.

Après je n’écris pas un roman avec une approche documentaire. Le réalisme est nécessaire mais pas suffisant. Je travaille beaucoup sur les personnages, les mécanismes psychologiques qui les poussent à faire ce qu’ils font, à être ce qu’ils sont. Ce sont les personnages et ce qu’ils traversent qui véhiculent l’émotion d’une histoire, pas l’univers dans lequel ça se passe.

On retrouve plusieurs des personnages rencontrés dans ton précédent roman « Toxique ». D’ailleurs leurs vies personnelles (et leurs failles) prennent une place prépondérante dans le roman…

Oui, sans personnages il n’y a pas d’histoire. Et je dirais même qu’il n’y a pas d’envie de raconter une histoire. Lorsque je travaille sur un récit, je commence par me demander ce que, humainement, le récit va pouvoir véhiculer. Dans le cas de Fantazmë, je voulais traiter d’un aspect particulièrement obscur de nos personnalités : les choses que l’on occulte, les choses que l’on cache à soit même et aux autres, non pas les secrets mais les émotions, honteuses parfois. Et en me baladant depuis des années sur le bitume parisien, je me suis souvent demandé combien de temps encore j’allais devoir enjamber les corps fatigués des SDF, des réfugiés et de tous les laissés-pour-compte. Et pourtant, je continue de passer au milieu d’eux, comme des ombres côtoyant ma vie sans réellement s’y mêler.

Le développement des réseaux sociaux, de l’information choc ne produisant finalement qu’un brusque relent de protestation, demain nous aurons oublié les enfants d’Alep pour nous concentrer sur l’obsolescence programmé de l’iphone 10 ou sur autre chose. Tout cela est lié au même processus psychologique nous poussant à « ignorer » certaines choses pour nous protéger de leur violence. Je ne jette la pierre à personne, nous ne sommes pas des saints capable de porter sur leurs épaules toute la misère humaine, je n’aime pas non plus les discours culpabilisants car, au final, ce n’est pas à nous de régler les grands soucis de notre monde mais à ceux auquel nous donnons le pouvoir… Non, je voulais que mes personnages soient eux aussi, comme nous, confrontés à ces ombres qui hantent nos vies, à ces dilemmes moraux avec lesquels nous cohabitons tous. Voilà, c’est ce qui donne la chair et la densité aux personnages qui gravitent autour de Tomar dans Fantazmë.

Ton intrigue est totalement connectée à l’actualité brûlante…

Ecoute, j’ai réellement créé ces personnages de flics parisiens au lendemain des attentats parce qu’il m’a semblé être évident que tout avait changé ! L’état d’urgence certes, mais aussi l’organisation au sein de la police, le rapport de la population à ceux qui la protège, rapport d’amour intense au lendemain des interventions, et de haine sans précédent lorsqu’on tente de faire brûler du flic. La police, la société, le monde se radicalise dans ses connexions et ma série de polar devait refléter cette réalité.

C’est pour cette raison qu’elle s’inscrit toujours dans la réalité historique des événements et que j’insère bon nombre de balises importantes. Pas seulement au niveau policier, mais également au niveau social ou culturel. Je voulais que Toxique lance une série policière moderne POST novembre 2015 comme les anglo-saxons savent si bien le faire depuis le 11 septembre. Ensuite, mes origines arméniennes me rappellent que je suis le fils d’un réfugié. Mon grand père a fui le génocide arménien en 1915, il a mis plusieurs années à rejoindre le port de Marseille puis la petite ville de Saint-Etienne où il a vécu sa vie de français. Ces gens qui dorment sous le métro pourraient être de ma famille et ils le sont à une centaine d’année près. Donc effectivement, j’ai orienté le récit vers eux, pour leur donner un peu de lumière et ne pas les laisser rester de simples spectres…

Ta manière de raconter l’histoire est toujours aussi cinématographique…

Forcément car je réfléchis en images. Ça me vient de la BD et du scénario mais également simplement de ma culture d’enfant des années 80 qui a grandi avec la télé, les vidéo clubs et les jeux vidéo.

Je ne suis ni littéraire, ni intellectuel même si ça ne m’empêche pas de réfléchir. J’essai d’écrire pour tout le monde et c’est en ça que j’admire des auteurs populaires comme S.King. En fait, je suis un mec et un auteur plutôt simple et accessible.

Je crois bien que tu n’en as pas fini avec tes personnages…

Ça c’est clair. J’ai eu la chance ultime de croiser le chemin de Caroline Lépée, Philippe Robinet, Constance Trapenard et toute l’équipe de chez Calmann et le Livre de poche. Ils font un travail du tonnerre pour que cette série existe et on connait tous le boulot que cela représente dans un secteur particulièrement concurrentiel.

Mon boulot à moi c’est d’être sincère et de vous livrer des histoires et des personnages qui le sont tout autant. Alors oui, il va y avoir de nombreuses enquêtes du commandant Tomar Khan, une tous les deux ans car je vais intercaler des thrillers en one shot entre chaque parution. Tomar, Rhonda, Francky, Dino et les autres ont encore beaucoup de choses à apprendre et à transmettre.



Catégories :Interviews littéraires

9 réponses

  1. Nath - Mes Lectures du Dimanche – Livres, ongles & Rock 'n Roll

    Contente de revoir Tomar et que ce ne soit pas la dernière !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      une longue série en cours et c’est une bonne nouvelle, oui 😉

  2. lecturedesam – Angers, France – je suis technicien support depuis fin septembre 2019. j'aime l'informatique, les livres, les comics

    Mon prochain roman en SP qui attend sagement dans ma PAL 🙂

  3. ducalmelucette – Du calme Lucette est un blog à forte tendance littéraire. Mais pas que !

    Super interview !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Merci pour lui ;-). Oui très très chouette

  4. Antonietta – Cannes La Bocca

    https://polldaddy.com/js/rating/rating.jsTrès bel échange avec ce merveilleux auteur ! Il me tarde de découvrir les nouvelles aventures de Tomar Khan… Merci pour ce beau moment !

  5. Moi aussi, je veux le lire 🙂

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Alors faut se lancer 😉

Rétroliens

  1. Fantazmë – Niko Tackian – EmOtionS – Blog littéraire et musical

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