C’est un voyage auquel nous convie Franck Bouysse, ou plutôt des voyages. Dans le temps – année 1914, début de la première guerre mondiale – et dans l’âme des hommes.
Proximité
Franck Bouysse a le talent rare de savoir recréer des atmosphères, à tel point que l’on se sent littéralement transporté dans le passé et dans ce monde rural qu’il décrit si bien.
Glaise est un roman qui marque par cette proximité que l’on ressent immédiatement avec des femmes et des hommes de la terre (même si on vit loin de ce monde là). Des vies simples, bousculées par l’arrivée de la guerre et le départ des hommes vers le front.
« Victor ne réagit pas lorsqu’on l’appela « soldat » pour la première fois, cette manière de les désigner frères, de les démembrer de leur passé, parut ruisseler sur lui. Ce ne fut qu’une fois l’uniforme revêtu qu’il prit véritablement conscience qu’on le volait de lui-même et de ceux qu’il aimait. »
Expérience humaine
L’auteur a pris le parti de ne pas décrire ce conflit mais de demeurer aux cotés de ceux qui restent, les jeunes, les vieux, les inaptes à la boucherie. Intrigue simple mais émotions grandeur nature. Ou l’art de sublimer par les mots, les maux d’un quotidien lourd, encore épaissi par la lointaine bataille. Cette cambrousse vidée de ses hommes partis en campagne et qui dicte ses lois.
C’est une vraie expérience humaine que de côtoyer ces êtres durs au mal et cette terre qui demande tant d’efforts. Une belle idée que de s’éloigner du conflit pour mieux se pencher sur ceux qui essayent de survivre.
Lire Franck Bouysse, c’est se confronter au meilleur comme au pire de ce que sont les hommes. Pas des fabulations fictionnelles non, des personnages qui auraient pu exister et qui partagent leur amour ou leur haine.
Si réaliste et si poétique à la fois
Avec Glaise, plus encore qu’avec les précédents romans de l’auteur, les mots frappent et ensorcellent le lecteur (ce qui n’est pas un mince exploit). Une écriture à la fois réaliste et poétique, si expressive et si belle. Mots choisis, soignés, polis, manipulés. Au point d’avoir envie de relire des passages entiers.
Et puis, il y a les dialogues, étonnants. Parce que, même si on a affaire à des taiseux, ils sont pétris d’humanité. Touchants, à l’extrême parfois.
Franck Bouysse a une capacité étonnante à ainsi déployer tant de puissance dans son écriture pour parler du quotidien. Pas besoin d’artifices quand on possède de telles dispositions pour faire parler les mots et les âmes. Glaise est un roman à l’histoire simple, sublimée par un auteur au sommet de son art. Peut-on encore parler de roman noir ? C’est discutable, mais c’est une question sans importance, Glaise est un roman universel.
Lien vers l’interview réalisée avec Franck Bouysse au sujet de ce roman
Sortie : 07 septembre 2017
Éditeur : La manufacture de livres
Genre : Roman noir
Ce que j’ai particulièrement aimé :
L’écriture, sublime
Les dialogues, très vrais
L’ambiance, très forte
4° de couverture
Au pied du Puy-Violent dans le cantal, dans la chaleur d’août 1914, les hommes se résignent à partir pour la guerre. Les dernières consignes sont données aux femmes et aux enfants: même si on pense revenir avant l’automne, les travaux des champs ne patienteront pas.
Chez les Landry, le père est mobilisé, ne reste que Joseph tout juste quinze ans, en tête à tête avec sa mère et qui ne peut compter que sur Léonard, le vieux voisin. Dans une ferme voisine, c’est Eugène, le fils qui est parti laissant son père, Valette, à ses rancoeurs et à sa rage: une main atrophiée lors d’un accident l’empêche d’accomplir son devoir et d’accompagner les autres hommes. Même son frère, celui de la ville, a pris la route de la guerre. Il a envoyé Hélène et sa fille Anna se réfugier dans la ferme des Valette. L’arrivée des deux femmes va bouleverser l’ordre immuable de la vie dans ces montagnes.
Catégories :Littérature
Tout à fait d’accord avec toi Yvan. C’est un très beau roman… Et puis, noir ou pas noir, quelle importance? Ce qui importe, ce sont les émotions ressenties, et pour ça, il y a largement de quoi…
La bise, mon pote. 🙂
Exactement, on s’en fout du flacon ! Hips ;-). La bise mon ami
Encore un auteur que je dois découvrir… Ô temps suspend ton vol !
Merci pour la page culturelle du jour 😉
… et vous, heures propices ! Suspendez votre cours : Laissez-nous savourer les rapides délices. Des plus beaux de nos jours !
Yvan, tu en parles si bien que je me demande encore pourquoi je n’ai pas trouvé le temps d’aller l’acheter au magasin !!!
Bon, il serait que je mette mes mains dans la glaise 😉
Tu parles trop, c’est pour ça que tu n’as pas trouvé le temps d’aller en librairie 😉
Là, tu as sans doute raison !! mdr
Tu me donne vraiment envie de fondre dessus….J’ai encore Plateau qui m’attends mais celui ci, je suis très impatiente de le découvrir! 😉
Je trouve que c’est son meilleur, le plus abouti
Déjà que j’avais trouvé que Grossir le ciel était exceptionnel….Je suis d’autant plus impatiente…;)
Quelle magnifique Chronique 😘❤️Il le mérite tellement.
Bon ben avec une chronique pareil si je n’avais pas déjà prévu cette lecture ben je l’aurai ajouté.
Bravo sire Yvan bel article une nouvelle fois !
merci 😉
avec plaisir !
Bon…. je vais me faire fustiger mais Grossir le ciel ne m’a pas plus emballée que ça et du coup…. pas sûre que je lise celui-ci 🙁
Pas taper hein !!!
Et pourtant… Je suis certain que celui-ci te toucherait bien davantage
Faut voir. .. mais je suis bien obligée de faire une sélection 😊😀
La dure loi de la sélection naturelle 😉
m’en parlez pas mon bon monsieur….
Très très bon livre, comme c’est dit dans cette chronique.
En bonus (si on veut), une dernière page, à lire attentivement, qui n’est pas vraiment du texte mais qui prolonge subtilement l’histoire.