1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre. 5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger.
Claire Favan
Titre : Serre-moi fort
Sortie : 11 février 2016
Éditeur : Robert Laffont – La bête noire
Lien vers ma chronique du roman
Si je te dis qu’en terme d’approche psychologique ce nouveau roman est sans doute celui qui se rapproche le plus de tes deux premiers romans (Le tueur intime – Le tueur de l’ombre), me contrediras-tu ?
Il s’en rapproche à plus d’un titre.
C’est un livre que j’ai écrit dans un timing relativement court, comme le tueur intime. Il m’a accompagné jours et nuits jusqu’à ce que mon histoire soit complète, jusqu’à ce que j’ai tous mes décors, tous mes personnages, tout leur mode de pensée, tous les événements. Je n’avais pas été hantée à ce point depuis le tueur intime.
Je renoue avec la violence psychologique et dans une moindre mesure physique à un degré que je n’avais plus eu depuis le diptyque du tueur.
Sans rien dévoiler de cette intrigue éminemment surprenante, tu as bien caché ton jeu avec un démarrage qui semblait assez traditionnel…
On va dire que sur la première moitié du livre, oui. Je voulais que le lecteur puisse pénétrer l’intimité de la famille d’une jeune fille disparue. Le sujet a déjà été traité, mais je voulais une vision interne de ces événements. Alors je les ai racontés par l’intermédiaire du second enfant de la famille, le malheureux survivant.
Dans la deuxième partie, je mets en scène une enquête épineuse.
Ceux qui me connaissent savent que cela ne peut me suffire parce qu’au moment où le lecteur se sentira en terrain connu et en relative sécurité, je bouleverse la donne et redistribue les cartes.
Certaines scènes sont particulièrement dures, que ce soit dans la violence physique ou mentale. Qu’est-ce qui est le plus compliqué à écrire ? Dans quel état es-tu ressortie après l’écriture de certains passages ?
Ce livre est celui qui m’a le plus perturbée. Je savais que je devais écrire ces fameuses scènes. Les raconter d’un point de vue physique n’aurait pas eu le même impact, alors je les ai racontées d’un point de vue psychologique. Finalement, c’est bien pire.
Parce qu’en choisissant cet angle, je créais un traumatisme à l’état brut, une souffrance terrible qui m’a pourchassée pendant des mois.
Je me réveillais la nuit, angoissée par ce que j’avais infligé à un de mes personnages, en me disant que je ne pouvais pas avoir écrit quelque chose d’aussi dur. Et en même temps, je savais que ces passages étaient nécessaires à mon intrigue.
Lorsque j’ai finalisé mon manuscrit et tapé le point final, le choc émotionnel a été très fort. J’ai eu du mal à revenir.
Les auteurs aiment leurs personnages. C’est difficile, voire pas naturel de leur faire du mal. Et même si je ne recule pas devant le challenge, cela m’a touchée.
Le roman se compose de plusieurs parties. J’ai trouvé que ton écriture y était à chaque fois différente. C’était un choix délibéré, dès le départ ?
La première partie est écrite à la première personne avec le ressenti du survivant qui subit de plein fouet les effets de la disparition de sa sœur. C’est un jeune garçon et c’est lui qui raconte ce qu’il vit au quotidien auprès de ses parents. J’ai utilisé une écriture simple et intimiste.
Dans les deux parties suivantes, je reviens à une narration qui me ressemble plus.
J’adapte simplement mon écriture à ce que j’ai à raconter.
Une telle intrigue ne peut-elle se dérouler qu’aux États-Unis ?
Dans Serre-moi fort, le décor pose une simple toile de fond. J’aurais pu placer l’intrigue n’importe où. Je le sais bien.
Mais, et là, je ne parle que pour moi, la France ne m’inspire pas.
À force d’entendre la suggestion, j’essaie de me projeter. Je vous assure que j’y pense régulièrement. L’effet est alors radical : d’un seul coup, je vois mon roman en noir et blanc et sans relief, comme si une chape de plomb s’abattait sur mon imagination.
J’écris pour m’évader et me demander d’écrire en France, cela revient à me ramener à la réalité.
Alors je me trouve des tas d’excuses : je ne comprends rien à la police française, les tueurs en série et les États unis…
La vérité, c’est que je n’en ai pas envie.
Photo officielle du site de l’éditeur © E. Robert Espalieu
Catégories :Interviews littéraires
C’est encore plus plaisant, mais rare pour moi car je lis souvent les livres en décalé par rapport à toi, de lire tes interviews quand tu as lu le livre. Je me régale donc 🙂
Merci à toi mon ami 😃
Merci pour cette belle interview. Moi qui me suis arrêté à “Apnée noire”, ça me donne bien envie de retrouver l’auteure du tueur intime et du tueur de l’ombre qui m’avaient scotché. Apnée noire était, pour moi, un ton en dessous.
Amitiés.
Toujours sympa de découvrir un peu plus les auteurs. Merci Yvan de me rappeler que je dois acheter ce livre 😉
Si je oeux être utile 😉
Je devrais me décider à sortir ses romans de mes étagères, parce que là, ça fait un peu trop longtemps qu’ils y trônent ! Je ne voudrais qu’elle vienne me hanter psychologiquement ! mdr
Excellente interview qui enfonce le clou, une fois de plus, sadique que tu es !
Je viens de le finir et une fois de plus…je suis chamboulée…perturbée….et j’ai même pleuré….. Claire a beaucoup de talent…. j’en reste sans voix!!!!
Ben si, tu vois bien que tu as retrouvé ta voix ;-). C’est un cri du coeur, ça !