1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre. 5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger.
Gilles Caillot
Titre : La couleur des âmes mortes
Sortie : 18 septembre 2015
Éditeur : Editions du Caïman
Lien vers ma chronique du roman
On te connaît dans le milieu du thriller pour tes romans souvent gores. Ce nouveau roman est lui aussi éprouvant, mais tu sembles avoir voulu davantage développer l’aspect psychologique…
C’est vrai, Yvan. Depuis mes débuts dans l’écriture, je pense avoir mûri et largement évolué. Le gore est bien sûr intéressant et je me suis amusé comme un petit fou avec la série Zanetti (L’ange du mal, Réminiscence, Immondanités et Les ailes arrachées des anges), mais je trouve que les psychologies humaines sont une formidable aire de jeu. Poser sa plume sur les âmes torturées, les effets et contre-effets de la nature humaine et de sa bassesse permet de développer des histoires plus intéressantes, plus crédibles. Et finalement bien plus proches de ce que nous vivons.
En tout cas, c’est ce qui me plaît aujourd’hui.
Les histoires de tueurs en série avec leurs sempiternels flics meurtris par la vie commencent sérieusement à m’ennuyer. Il n’y a plus d’originalité ou très peu. A mon sens, la richesse d’un récit réside dans ses personnages. Ce sont eux qui font 90% de l’histoire. Bien sûr, l’intrigue est importante mais l’immersion dans les psychologies pose le roman. Combien de fois j’ai pu râler intérieurement en lisant un livre en me disant : pffff… Pas crédible… Réaction pas crédible du tout… Jamais personne ne ferait ça dans la vraie vie.
Alors, j’ai amorcé un virage, quittant progressivement la voie du pur thriller policier d’action pour entamer une descente dans les limbes psychiatriques. D’ailleurs, comme tu as pu le remarquer, dans La couleur des âmes mortes, l’aspect policier est complètement relégué au second rang.
Les thèmes de ton récit sont particulièrement sensibles. Le thriller permet aussi de faire passer des messages selon toi ?
Bien sûr !
Pour moi, le thriller n’est qu’un effet de style. Un rythme. C’est une façon de raconter une histoire. Le thriller se veut caméra au poing, vif, palpitant, vibrant, bourré d’actions et surtout de rebondissements. Il n’empêche en rien le passage de messages. Le fait d’aborder un sujet d’un point de vue intériorisé permet de jeter plus facilement des pavés dans la mare et de faire réfléchir le lecteur (car dans ce mode narratif, il a l’impression d’être dans la confidence des protagonistes). En tout cas, je pense qu’en créant cette intimité qu’on touche d’autant plus le lecteur.
Tout comme le roman social, le roman noir, le thriller permet de nourrir des réflexions beaucoup plus profondes. Pour ma part, La couleur des âmes mortes l’est. En tout cas, je l’espère… Car c’était mon vraiment mon intention.
Lorsque tu as écris cette histoire, t’étais-tu fixé des limites concernant le traitement de ces sujets ?
Une seule limite. Celle relative aux enfants et aux descriptions de viols. Je suis père de famille nombreuse et la pédophilie est un sujet lourd qui me glace le sang.
Je me suis donc, autant que faire se peut, auto censuré sur quelques scènes que je ne pouvais pas produire car beaucoup trop douloureuses à écrire et qui finalement n’aurait pas apporté grand-chose si ce n’est qu’un côté glauque et malsain au roman. Ce que je ne voulais pas.
Quand j’ai écrit ce livre, j’étais dans la tête, dans les émotions de Denis. Un père foudroyé auquel on avait arraché son enfant dans le pire des scénarios. Ce que je voulais faire ressentir aux lecteurs c’était cette haine et ce désir de vengeance incommensurable qui prenaient corps. Des émotions non canalisables… quitte à franchir la ligne jaune pour massacrer le meurtrier d’un de ses enfants.
Ce qui m’importait, c’était la vraisemblance dans les émotions et les réactions en chaîne de nos psychés. Être au plus proche des ressentis… D’où le titre : La couleur des âmes mortes. Car c’est une psychanalyse des âmes dont il s’agit ainsi que celle (un peu) de notre société et de sa « bien-pensance ».
Comment sort-on d’une telle histoire, en tant qu’écrivain ?
Épuisé ! Vidé ! Groggy !
La couleur des âmes mortes est un roman viscéral qui a été particulièrement difficile à écrire de par son ancrage dans la douleur et la haine véhiculée entre les protagonistes. Il y a aussi sa vraisemblance, le parallèle que l’on peut faire avec certaines horreurs de la vraie vie. Pour moi, cette histoire est une histoire de fait divers, comme il en existe tant.
Sinon, comme tu le dis dans ta chronique (à laquelle j’ai été très sensible, d’ailleurs), le roman est un uppercut. Il suscitera certainement beaucoup d’émotions aux lecteurs. J’en suis persuadé.
La couleur des âmes mortes est sans doute une façon de poser sur papier mes peurs les plus animales. Peur pour mes enfants dans un monde où les prédateurs sont plus médiatisés, plus nombreux (peut-être), en tout cas qui donnent l’impression de se rapprocher de nos têtes blondes.
Ça, c’était pour la part pédophile du roman, pour le reste, la trahison, la violence, le désespoir, le tourment intérieur, la vengeance sont des éléments intrinsèques de l’arc-en-ciel ténébreux de l’âme humaine. C’était à la fois intense et oppressant de les mettre en musique dans le cadre d’une histoire.
Ton écriture est caractéristique, très cinématographique, je trouve…
On m’a souvent dit cela. Je pense effectivement que j’ai un style très visuel, une musicalité, une façon de décrire et d’écrire. J’arrive visiblement à faire passer des images au travers de mes lignes, une ambiance, la description d’un moment intense, d’une action.
Pour l’anecdote, lors de l’étude pour adaptation cinématographique de Lignes de sang (qui a finalement été abandonnée), le producteur m’avait fait cette remarque et avait conclu en me disant qu’avec ce qu’il avait entre les mains, le travail de mise en scénario serait plutôt aisé.
En tout cas, c’est un beau compliment car je trouve qu’un roman doit guider le lecteur dans sa projection même s’il doit lui rester une part d’imagination.
Crédit photo : Les Pictographistes
Catégories :Interviews littéraires
Profond, intéressant et passionnant. C’est bien qu’il soit passé à autre chose. Moins bien pour les amateurs de gore dont je ne fais pas partie 🙂
Je suis sur la même ligne que toi 😉
ha ben je sais 🙂
Pari réussi donc, j’ai envie de le lire son livre après cette interview!!!!;)
Bravo à l’auteur, alors 😉
😉
Je ne peux faire qu’attendre ce livre en dormant en dessous de ma boite aux lettres!!! Je suis trop fan moi!!!
Ne va pas prendre froid hein !
Foumette, couvre bien tes petites fesses pour ne pas qu’elles aient froid durant tes nuits endormie sous la boite aux lettres…
Elles sont bien couvertes hein!!! Culotte en polaire ahahahha
c’est bien, tu prends soin de toi 😉
Et en poils de pilou, t’en mets plus ?? Couvre bien tes fesses, faudrait pas attraper un courant d’air mal placé ;-))
Les histoires de tueurs en série avec leurs sempiternels flics meurtris par la vie commencent sérieusement à m’ennuyer.”… Je suis assez content de l’entendre dire de la bouche de Gilles ! A vrai dire, je n’avais plus envie d’être confronté à du…”encore la même chose” ! Voilà donc…qui me titille un peu ! Excellent travail…Yvan ! Mais, ça…je le savais déjà ! Ah…quand…une mauvaise interview….ou une mauvaise chronique…Yvan ? Arf ! Suis d’humeur taquine….mon pote ! Ne m’en veux pas…c’est à cause du King !!! émoticône wink
Pour les mauvaises chroniques tu as dû passer à côté ;-). Pour les interviews, je ne propose qu’à de bons auteurs c’est normal.
Retourne voir le Dieu King !
Je ne me suis pas encore plongé dans l’univers de Gilles Caillot (pas taper hein 🙂 ) il semble grand temps que je commence à parfaire mon éducation. Un titre en particulier parmi ses œuvres pour démarrer ?
Belle interview au passage !
Ayant lu un roman de l’auteur, j’ai pu sortir un peu de la cave (mais j’y suis retournée à cause des autres) et je dois dire que j’avais passé un bon moment de lecture et un final qui m’avait fait ouvrir grand mes yeux.
Je note celui-ci parce que je ne cours pas derrière le gore à tout prix… 😉 merci de l’interview et des réponses de l’auteur. À quant un interview pourrave de Barbara Cartland, mon Yvan ? Un interview merdique, une fois de temps en temps, ça nous changerait de l’excellence 😀
Mais elle morte non ? Je ne fais pas dans la nécrophilie littéraire
*voix d’Alain Chabat imitant Jacques Martin* Non, Barbara Cartland n’est pas mooorte ! Tu as vu son hommage chez Jean-Pierre Foucault ? Non ! Alors Barabara n’est pas morte… Barbara, si tu nous écoute…
Merci pour cette minute culturelle 😉
Un sketch qui vaut son pesant d’or et de rire !