J.C. Hutchins, accompagné de son compère Jordan Weisman, nous font douter de tout, à chaque page de ce Chambre 507.
Un roman à ne pas rater pour les amateurs du genre, et ce n’est pas cette passionnante interview de l’auteur américain J.C. Hutchins qui va vous faire douter à ce sujet !
Ma chronique de Chambre 507
Un grand merci à Julie pour la traduction. Vous pouvez la retrouver sur son excellent blog Evasions julivresques.
Question rituelle pour démarrer mes interviews, pouvez-vous vous définir en trois mots, juste trois ?
Grand enfant 🙂 (Child at heart)
Vous êtes un vrai touche-à-tout, travaillant au travers de différents médias. Comment pourriez-vous définir votre travail ?
J’ai écrit plusieurs romans classiques, mais je travaille aussi dans un domaine appelé “la narration transmédia” – parfois appelée la narration cross-média. Dans sa forme la plus simple, la narration transmédia utilise plusieurs médias de façon non conventionnelle pour offrir des récits immersifs, cohérents. Mon travail dans ce domaine mêle souvent des techniques de narration familières et des médias avec des éléments innovants tels que l’interaction en ligne, la téléphonie, des événements en direct et plus.
Je suis souvent recruté par des sociétés de marketing ou de divertissement pour aider à concevoir les histoires pour ces projets immersifs, puis aider à les écrire.
Vous avez mentionné que je suis un touche-à-tout. C’est très important dans ce domaine ! Il est nécessaire de connaître les forces de différents médias de narration, pour savoir comment les appliquer à des histoires multimédias. Par exemple : il est mieux de laisser des expositions complexes en texte, mais le texte ne peut jamais capturer un moment aussi précisément qu’une photographie. Et les photos ne peuvent pas transmettre l’urgence de la vidéo ou de l’audio. Savoir quel média utiliser et quand est une partie importante de la conception et de la création d’expériences transmédiatiques.
Quelles sont les principales différences entre écrire un roman et écrire une histoire qui sera mise en images ?
Cela revient à la question de connaitre les points forts de chaque média – et leurs faiblesses !
Écrire un roman permet à l’auteur (et au lecteur) d’explorer le côté intérieur des histoires et des personnages. Les romans nous permettent de nous plonger à l’intérieur de l’esprit des personnages et d’apprendre leur passé, leurs bizarreries et leurs personnalités à travers des flashbacks ou des pensées internes. Dans un roman, un personnage peut jeter un coup d’œil sur une bouteille de bière, et tout à coup – boum ! – nous sommes dans son esprit, apprenant son histoire personnelle, son enfance, ses pensées complexes sur la façon dont cette bouteille de bière lui rappelle sa mère abusive ivre, et comment cette relation a eu des répercussions sur sa vie romantique d’adulte. Même si elle est morte depuis 20 ans, sa maman hante encore son quotidien. Ce genre de chose.
En revanche, écrire une histoire qui utilise un support visuel (sans texte complémentaire) ne permet pas d’utiliser cette plongée à l’intérieur de l’esprit des personnages, ou d’autres détails fournis par un narrateur omniscient. Au lieu de cela, ces histoires doivent exprimer cette information visuellement. Les meilleurs films et émissions de télévision font cela avec un symbolisme visuel, ce qui peut être très difficile à faire avec élégance. Par exemple, quand une femme mord dans une pomme dans un film, le sujet de la scène n’est pas le soulagement de sa faim. Ses actions évoquent un mythe qui est très familier à beaucoup d’entre nous – et nous disent quelque chose sur elle, ou vers où l’histoire va.
Ces différents médias ont leurs points forts respectifs, et sont tous de merveilleuses formes d’art pour raconter des histoires. Comme l’a dit le romancier Stephen King : “Les livres et les films sont comme des pommes et des oranges. Ils sont tous les deux délicieux, mais ont un goût complètement différent.”
Dans ce roman, vous laissez un grande part d’interprétation au lecteur, au point de le faire douter continuellement. C’était une volonté de départ ?
C’est un signe que le point de vue du protagoniste des événements à venir peut ne pas être entièrement digne de confiance – ou à tout le moins, que les événements à venir pourraient être étranges et inhabituels, et ne pas être crus par une personne rationnelle.
Quand j’ai travaillé sur Chambre 507, l’un de mes objectifs était de créer des rebondissements et des moments effrayants qui pourraient être interprétés comme étant des phénomènes naturels ou surnaturels. Est-ce que le protagoniste assiste à des événements surnaturels terribles, ou interprète-il mal des événements aux causes parfaitement rationnelles ? Cette incertitude a été conçue pour créer un sentiment de paranoïa chez les personnages de l’histoire, et je l’espère chez le lecteur.
Vous arrivez incroyablement bien à susciter une atmosphère de peur dans ce roman. Pas évident de créer une telle ambiance juste avec des mots, non ?
Merci beaucoup ! J’ai vraiment essayé de faire de Chambre 507 un livre effrayant – mais pas un roman d’horreur. Je suis honoré que vous trouviez que j’ai réussi à le faire !
Oui, créer une atmosphère de peur et de crainte peut être très difficile dans un récit comportant uniquement du texte. Vous n’avez pas “l’éclairage sinistre ” et la musique effrayante, comme au cinéma !
Je donne beaucoup d’importance aux décors. J’essaie de rendre les décors de mes récots mémorables, avec des histoires et des personnalités qui leur sont propres – comme n’importe quel autre personnage dans une histoire. Dans Chambre 507, l’emplacement de l’hôpital psychiatrique Brinkvale a une histoire terrible, il semble respirer avec effroi. Le fait que l’hôpital psychiatrique réside en souterrain dans une carrière abandonnée suggère à quel point l’endroit peut devenir isolé et surréaliste. Si un emplacement comme ça peut exister dans un roman, quelles autres choses terribles peuvent se cacher dans ses pages ?
J’aime aussi “la descente” – l’extraction d’un personnage loin de sa vie normale, le poussant dans une expérience qu’il ne peut pas comprendre facilement ni même croire. C’est ce qui arrive au personnage dans Chambre 507 : il débute dans cette histoire de manière sceptique, mais rencontre ensuite des gens et voit des choses qu’il ne peut pas expliquer avec l’esprit d’un sceptique. Cette descente – et la remise en cause inévitable de la réalité et du bon sens qui l’accompagne – aide vraiment à contribuer à un sentiment de peur.
Avec le début du roman et ces échanges entre l’art thérapeute et son patient soupçonné de meurtres, on peut faire un parallèle avec Le silence des agneaux. Vous êtes-vous volontairement amusé à jouer sur ce rapprochement ?
Oui. Je considère ces scènes dans Chambre 507 comme mon hommage personnel au Silence des agneaux – une sorte de “merci” pour la grande histoire qu’il représente.
Tant le roman de Thomas Harris que le film de Jonathan Demme ont eu un impact énormes sur moi en tant que narrateur.
Un autre roman de Harris qui m’a profondément touché et inspiré est Dragon Rouge, le premier roman de la série des Hannibal Lecter.
Quelques mots sur vos dernières réalisations et vos futurs projets ?
J’ai aidé à créer certains récits transmédias amusants qui ont été primés pour des entreprises comme la 20th Century Fox, A&E, Cinemax, Discovery, FOX Broadcasting et Infiniti. Je suis aussi connu pour Le 7e Fils, ma trilogie de technothrillers.
Les lecteurs et les romanciers ont salué cette série comme “sacrément bonne”, “une aventure tordue” et “très bien écrite”. Je suis ravi que tant de gens l’apprécient.
Vous innovez énormément dans vos différents projet. L’avenir de la littérature passera t-il obligatoirement par une autre manière de voir les choses, à votre avis ?
Oui et non. Pour être clair, il y aura toujours des histoires qui seront mieux racontées au travers d’un seul support. Les romans et les films ne vont jamais, jamais disparaître. Mais utiliser une “approche transmédia” pour créer des histoires est certainement utile, et à envisager pour les narrateurs.
Une fois que vous vous rendez compte que presque toutes les formes de communication autour de nous – votre téléphone, un panneau publicitaire, une lettre à la poste, un t-shirt, un «tweet» – peuvent être utilisées pour contribuer à un récit connecté, immersif, cela étend vraiment la façon dont nous percevons, et expérimentons la narration. C’est excitant pour moi.
Ce blog est fait de sons et de mots (on est tous les deux amateurs de gros son). Quelle part prend la musique dans votre processus créatif ?
Oui, j’aime écouter de la musique quand j’écris. Mais je trouve que la musique avec des paroles me distrait, donc j’écoute souvent de la musique classique et des bandes originales de films et de series télé.
Vous avez le choix entre nous donner le mot de la fin ou votre dessert préféré…
Je serai heureux de vous parler de mon dessert préféré ! Comme bon nombre de vos lecteurs sont français, ils ne seront probablement pas impressionnés par mon choix, mais j’aime les crêpes !
Ma copine et moi avons vécu à Paris pendant plusieurs mois l’été dernier. Lorsque nous étions là-bas, j’ai mangé des crêpes pour la première fois de ma vie (malheureusement, il n’y a pas beaucoup de crêperies aux États-Unis). Et j’en suis tombé amoureux ! J’apprécie aussi les crêpes avec de la viande, des légumes et du fromage… mais ce sont les crêpes sucrées que j’aime le plus.
J’ai mangé quelques crêpes ici aux États-Unis depuis mon retour de ce voyage merveilleux, mais elles ne valent pas les excellentes crêpes que je mangeais lorsque je vivais à Paris. Oh, combien je tiens à revenir en France, ne serait-ce que pour les crêpes !
Catégories :Interviews littéraires
S’il nous offre d’autres bouquins de cette trempe je veux lui envoyer des crêpes à la pelle 😀
* je veux bien
Ahah, oui on va lui préparer un joli paquet 😉
super cette interview,joli travail qui renforce l’envie de lire le livre.
merci 😉 Content d’avoir donné l’envie de lire ce livre
Chouette interview… ç’aurait été sympa de citer aussi la traductrice du livre (qui peut vous dire que ça n’a pas été une mince affaire !)
Bonjour Valérie,
J’ai un immense respect pour le travail réalisé par les traducteurs. J’essaye d’ailleurs de les mettre en avant dans le cadre d’interviews également.
J’ai débuté avec Sara Doke et une prochaine suivra bientôt.
Vous avez tout à fait raison, il faut que je mette en avant le nom du traducteur du livre, je le ferai dorénavant figurer dans mes chroniques.
Je me doute effectivement que cette traduction n’a pas été si aisée !
Je confirme que son anglais n’est pas facile à traduire ;). Je suis en plein dans le livre, passionnant, merci Yvan pour cette découverte!
merci à toi surtout chère Julie 😉
Ça tombe bien puisque j’ai commencé à le lire 🙂
Les références sont excellentes , les questions intelligentes et les réponses pertinentes, que demander de plus…. 🙂
de finir de le lire ? 😉
Curieux de ton futur avis, surtout concernant la fin 😉
Encore du bon boulot… Yvan !
merci mon pote 😉
mais faut féliciter l’auteur surtout
Merci pour cette très intéressante interview. Il ne me reste maintenant plus qu’à lire Chambre 507 dont le résumé seul suffit à me tenter 😉
oui, il a vraiment sur être intéressant dans son interview et son roman vaut la peine
Hahahaha, je note, je note ! Si je capte pas, on se fera une conférence au somment via fesse de bouc, avec Lord, Foum, toi et moi ! 😀
Excellente interview ! j’ai adoré.
la conférence risque d’être inoubliable 😉
Sûrement ! On fera se bidonner les mecs de la NSA.
Sacré bonhomme, merci de nous le faire découvrir cher ami.
ça donne quelques explications quand à la folie du bouquin 😉
Une sorte de making of, oui 🙂
J’abandonne mon projet de friterie en Suède pour me lancer dans l’ouverture d’une crêperie aux États-Unis ! 😀
Non déconne pas Fred !! J’ai eu l’idée avant toi 😉
Une petite association franco-belge ?
Et ben…on peut dire que ce mec m’a complètement chamboulée…et en plus il l’a fait exprès grrrrr….. Merci 😛
eheh c’est exact 😉