Et la ville sera vide – Olivier Claudon

Une grande ville européenne vidée de ses habitants en 48 heures, est un fait presque unique dans l’Histoire. C’était à Strasbourg le 1er septembre 1939, juste avant la déclaration de la deuxième guerre mondiale, au moment de l’invasion de la Pologne. Une évacuation préparée de longue date, qui s’est faite de manière très rapide et sans accroc.

Ambiance irréelle qu’une ville vide, avec juste les militaires en patrouille. Et quelques civils qui terminent leurs « missions ».

Destins croisés

C’est le terrain de jeu choisi par Olivier Claudon pour son premier roman. Journaliste au quotidien Les Dernières Nouvelles d’Alsace, il connaît bien la région. Pour ma part, c’est ma ville de naissance, ce qui a accentué ma curiosité de lecteur (sans en être la seule raison, loin de là).

L’auteur a imaginé les destins croisés de deux personnages aux antipodes. L’un, ancien policier, est l’enquêteur désabusé d’une grande banque parisienne. Envoyé dans la future capitale européenne, il est à la recherche de kilos d’or qui auraient été oubliés dans l’une des succursales alsaciennes. L’autre, jeune orphelin strasbourgeois, décide de partir à la recherche de son passé et de ses racines plutôt que de s’enfuir avec le reste de la population.

Ambiance irréelle et si réelle

Quelle belle idée que de situer l’action dans cette ville devenue fantôme, dans ces rues désertées de leurs âmes. Le vide n’est pas liberté, au contraire il oppresse. L’ambiance est posée, irréelle et si réelle, mais il fallait ensuite réussir à raconter une vraie histoire.

Et l’écrivain le fait avec brio et surtout avec une belle humanité. Il la conte à travers les yeux de ses personnages, sans jamais tomber dans la leçon d’Histoire, avec une volonté de laisser la fiction prendre le pas sur le contexte authentique.

Il le fait à travers un véritable suspense, aussi intéressant qu’original. Qu’est devenu cet or ? Qui sont les parents de ce jeune de sang-mêlé ?

Deux quêtes de sens, ancrées dans ce présent d’exode, mais aussi des plongées dans le passé pour trouver les explications. Elles ne seront pas toutes agréables à entendre, mais vont permettre à ces deux enquêteurs improbables de lier leurs destins.

Point de bascule

Difficile de classer ce roman, et c’est tant mieux. Le suspense est bien présent, l’émotion également. Les deux recherches deviennent aventures, dans le passé obscur de certains des notables strasbourgeois qui dépasse largement les frontières de la ville. Oui, le récit est plus surprenant encore qu’il n’y parait.

La cité est à un point de bascule, les deux personnages également, mais pas pour les mêmes raisons. On s’y attache vite, et ils auraient bien mérités quelques pages supplémentaires pour les décrire.

Olivier Claudon a un vrai talent de raconteur d’histoires, avec une plume alerte et agréable, toujours au service de l’intrigue et des protagonistes. Et la ville sera vide, et pourtant encore emplie d’émotions au travers de ces deux destins de vie.

Voilà un roman qui allie divertissement, ambiance, et fond historique, de quoi passer un vrai bon moment durant ces 200 pages.

A noter, pour compléter le récit et l’ancrer dans les faits, le livre propose en fin un texte de quelques pages de Daniel Fischer qui raconte cette évacuation avec son œil de d’historien.

Yvan Fauth

Date de sortie : 12 septembre 2019

Éditeur : La Nuée Bleue

Genre : aventure historique à suspense

4° de couverture

Le 1er septembre 1939, jour de la mobilisation générale, les habitants de Strasbourg reçoivent l’ordre d’évacuer la ville en 48 heures.
Le roman démarre dans le bruit assourdissant des cloches et des sirènes qui appellent à l’exil et se prolonge dans le silence d’une ville fantôme où résonnent les pas d’un enfant.
Olivier Claudon conte en finesse l’histoire d’un orphelin qui fugue en quête de ses racines et celle d’un inspecteur envoyé à Strasbourg par le président d’une banque parisienne à la recherche d’un hypothétique stock d’or. La quête initiatique du jeune Albert et l’enquête de l’inspecteur Monge se croisent dans une ville morte. Avant que leur
monde ne bascule.



Catégories :Littérature

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4 réponses

  1. Aude Bouquine – « Lire c’est pouvoir se glisser sous différentes peaux et vivre plusieurs vies. » Ici, je lis, je rêve, je parle de mes émotions de lectures, avec des mots. Le plus objectivement possible. Honnêtement, avec respect. Poussez la porte. Soyez les bienvenus dans mon univers littéraire.

    Très intéressant ! Je ne connaissais pas du tout 😉

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Éditeur local, le genre de livre dont on ne parle pas partout, à tort 😉

      • Aude Bouquine – « Lire c’est pouvoir se glisser sous différentes peaux et vivre plusieurs vies. » Ici, je lis, je rêve, je parle de mes émotions de lectures, avec des mots. Le plus objectivement possible. Honnêtement, avec respect. Poussez la porte. Soyez les bienvenus dans mon univers littéraire.

        Oui la Nuée bleue ça me parle 😉

  2. belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

    Et je parie que tu étais déjà là en 39… 😛 Non, je n’ajoute pas ce roman, trop à lire et pas assez de temps, malgré mon rythme infernal 😉

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