Interview – 1 livre en 5 questions : Le brasier – Vincent Hauuy

1 livre et 5 questions à son auteur, pour lui permettre de présenter son œuvre.

5 réponses pour vous donner envie de vous y plonger.

Vincent Hauuy

Titre : Le brasier

Editeur : Hugo

Date de sortie : 05 avril 2018

Lien vers ma chronique du roman

C’était compliqué de rebondir avec un second roman, quand on a rencontré un inattendu succès comme le tien avec « Le tricycle rouge » ?

Je ne vais pas m’en cacher. Oui, cela a été compliqué. Dans un sens, j’ai écrit le deuxième opus dans l’ombre du premier. J’avais une pression supplémentaire ; celle d’être à la hauteur, de ne pas décevoir mon lectorat. Et en même temps, je voulais proposer une intrigue différente qui ne serait pas architecturée autour de la même structure. (Et puis, Le Tricycle Rouge est quand même un whodunit qui comporte une grande part de mystère, je ne pouvais vraiment pas répéter la formule)

Mais à vrai, toutes ces questions ou angoisses surviennent surtout en dehors de la phase d’écriture. Lorsque je suis devant l’écran, les doigts posés sur les touches du clavier, les angoisses disparaissent et me laissent seul avec mes personnages.

Sans trop en dire, les thématiques de cette intrigue sont flippantes, à l’image des hallucinants prologue et premier chapitre…

Flippantes oui. Lorsqu’on l’on suit les avancés scientifique on se rend compte que la singularité est à nos portes. Et si l’on en croit Ray Kurzweil, le roi des prédictions scientifiques (ou encore Elon Musk, ou le regretté Stephen Hawking), l’heure de la bascule (et par extension du transhumanisme) est proche. Nous vivons une période à la fois grisante et terrifiante. D’ailleurs, certaines parties du roman pourront paraître ubuesques à certains, pourtant je n’invente rien. Il y a quelques années, j’ai eu la chance de discuter avec une personne ayant travaillé dans les renseignements. Ce qu’il m’a dévoilé était assez hallucinant et étaye certaines thématiques abordées dans Le brasier. Bien sûr, je sais faire la part des choses (je ne suis pas un adepte de la théorie du complot) mais c’était tentant d’utiliser ces informations dans une œuvre de fiction.

Tu arrives à ce que la tension ne retombe pas, malgré les 525 pages. C’était un challenge de tous les instants, durant la phase d’écriture ?

Je ne vais pas dire que c’est facile, mais j’ai un background en scénarisation, cela aide. J’ai également beaucoup travaillé sur des techniques de narration. Je dirais que l’enjeu, c’est le rythme. Trouver une bonne balance entre actions (à ne pas confondre avec agitation ou mouvement. Un dialogue est une action par exemple), descriptions et introspections. Lorsque l’on veut écrire un thriller de ce genre (choral, avec de multiples lieux, différentes temporalités) il ne faut pas avoir peur de couper, de faire des ellipses. D’ailleurs, il existe une sorte de « règle » (ou plutôt un conseil) qui revient souvent dans ouvrages consacrés à la narratologie : « Entering Late, Leaving Early », le lecteur débarque dans la scène in media res. En outre, lorsque j’aborde une scène je me pose deux questions : est-ce que cette scène fait progresser l’intrigue ? Est-ce que cette scène fait progresser le personnage ? Si j’arrive à répondre oui à l’une des deux, je la conserve. Finalement, il y a le style que je tente d’épurer pour le rendre plus dynamique et fluide. Dans cette optique, je préfère le bon mot au beau mot.

Tu aimes tout particulièrement tes personnages, ça se sent, surtout ceux qu’on retrouve par rapport au premier roman (le choix de leurs prénoms le prouve, d’ailleurs)…

Je l’avais déjà mentionné lors du questionnaire sur Le Tricycle Rouge. Les personnages sont ma priorité. Sans eux, pas d’empathie. Et sans empathie, pas d’attache. Quelle que soit la richesse ou la complexité de l’intrigue, si la distanciation est trop importante, on va survoler le roman, ou le lire comme un documentaire (s’il y a matière, bien entendu). Les événements dramatiques auront également moins d’impact.

Ce que j’aime faire avec mes personnages, c’est leur donner des travers, des expressions particulières. Ils sont souvent un peu excentriques et possèdent tous une singularité et un caractère fort. Mais aucun n’est ni blanc ni noir. Les protagonistes ont leur part d’ombres, les antagonistes ont des circonstances atténuantes. Pour Le brasier , en dehors des personnages principaux, je me suis beaucoup amusé avec Abraham Eisik.

C’est un thriller « à l’américaine ». Tu penses y avoir apporté une certaine touche européenne, toi le français expatrié au Canada ?

Difficile de répondre à celle-là. Je pense que oui, puisque ma culture est française. Dans le même temps, je suis un « enfant » de la pop culture US doublé d’un geek à tendance nerd. Jeux de rôles papier ou grandeur nature, jeux vidéo, jeux de plateau, comics, cinéma, séries TV, roman de fantasy, thrillers fantastiques, science-fiction. J’ai eu toute la panoplie en intraveineuse dès le plus jeune âge. À l’époque (les années 80-90) toute cette manne venait en majorité des Etats-Unis. (Pas étonnant que des séries comme « Stranger Things » soient populaires auprès de ma génération, d’ailleurs j’ai hâte de visionner Cobra Kai, qui place les protagonistes de Karate Kid, mais trente-quatre ans plus tard)

Et puis, étrangement j’ai plus facile à parler de l’étranger que de la France et visiblement, je ne suis pas le seul. J’ai assisté à un « master class » cinéma donné par Denis Villeneuve à Montréal. Il expliquait qu’il lui était plus facile de réaliser des films qui se déroulent à l’étranger que de parler de son propre pays (il l’avait fait avec polytechnique) qu’il n’était pas encore prêt à le faire, mais qu’il y reviendrait. Sans vouloir me comparer, je ressens un peu la même chose.

Mais bon, pour le prochain, je vais sortir de ma zone de confort, car l’intrigue se situera dans l’est de la France.

 



Catégories :Interviews littéraires

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6 réponses

  1. brindille33 – J'aime la nature, les livres, romans, polars, la photo, la musique, cinéphile, les documentaires, autodidacte. Et l'informatique depuis sa naissance, où j'ai tout appris toute seule.

    Si cela ne donne pas envie de l’acheter ?
    J’ai adoré le Tricycle Rouge, et je me demandais en lisant le quatrième de couverture si celui-ci ne me décevrait pas. C’est vrai que c’est un challenge bien lourd pour un auteur de relever le défi après un succès aussi tonitruant que ce premier livre.
    Je viens de lire l’interview fort sympathique d’ailleurs et suis convaincue. 🙂 Merci à toi gruznamur pour ce bel article. 🙂

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Tu peux y aller en confiance si tu as aimé le premier. Oui, très chouette interview de la part de Vincent Hauuy 😉

      • brindille33 – J'aime la nature, les livres, romans, polars, la photo, la musique, cinéphile, les documentaires, autodidacte. Et l'informatique depuis sa naissance, où j'ai tout appris toute seule.

        Merciiiii 🙂

        • brindille33 – J'aime la nature, les livres, romans, polars, la photo, la musique, cinéphile, les documentaires, autodidacte. Et l'informatique depuis sa naissance, où j'ai tout appris toute seule.

          J’ai terminé « Le Brasier » où je viens de mettre un commentaire sur ton site. J’ai noté ceci de la part de l’auteur :
           » (Et puis, Le Tricycle Rouge est quand même un whodunit qui comporte une grande part de mystère, je ne pouvais vraiment pas répéter la formule) »
          Totalement réussi. C’est du moins mon avis.

Rétroliens

  1. Le brasier – Vincent Hauuy – EmOtionS – Blog littéraire et musical
  2. Le brasier – Vincent Hauuy | 22h05 rue des Dames

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