L’année du lion – Deon Meyer

Le monde ne tient plus qu’à un fil ; fil ténu que l’aveuglement des hommes risque de couper irrémédiablement.

Deon Meyer, l’un des grands noms du polar international, s’est lancé dans un autre challenge. Raconter une récit post-apocalyptique, après qu’un virus extrêmement virulent ait décimé 95 % de la population. L’année du lion est l’histoire des premières années post virus, à travers le destin de quelques personnes en Afrique du Sud. Des contrées que l’auteur connaît bien, puisqu’il y est né et qu’il écrit dans sa langue d’origine (excellente double traduction de l’afrikaans et de l’anglais par Catherine du Toit et Marie-Caroline Aubert).

Crépuscule et collaboration

Il fallait oser sortir ainsi de sa zone de confort et proposer un univers totalement différent de celui dans lequel on a l’habitude de le trouver. Deon Meyer le dit lui-même, cette historie l’a obsédé pendant cinq ans. Il est certain qu’elle obsédera aussi nombre de lecteurs, tant la puissance de ce récit le classe dans les inoubliables. Rien que ça, oui.

L’année du lion semble être un récit vespéral, qui débute au crépuscule de l’humanité. Mais il est tellement plus que ça… Certains l’ont comparé à La route de Cormac McCarthy (The Times, par exemple, c’est inscrit sur la quatrième de couverture). Si les premières pages peuvent effectivement faire penser à ce roman, il est pourtant son antithèse, à mon sens. Oui, la relation filiale est un des cœurs de ce livre, mais là où La route était un roman emprunt de solitude, L’année du lion met la collaboration et les échanges au centre de tout.

Optimiste ?

Afrique, berceau de l’humanité. Et qui en devient le tombeau, le virus en étant originaire. C’est l’histoire d’hommes et de femmes qui se regroupent pour survivre, par volonté ou par hasard. Difficile d’utiliser le mot de colonie, quand on sait qu’elle se déroule en Afrique du Sud, mot trop connoté. Mais on peut parler de communauté.

Un monde qui s’écroule en quelques semaines, et régresse d’un coup. Un monde de peurs, de souffrances. Mais qui cherche aussi à se créer une nouvelle identité. L’homme est-il capable de travailler en symbiose pour se relever ?

Ce qui se déroule tout au long de ces pages est parfois terriblement violent. Mais d’une humanité folle. Même si on a droit à des gangs de pilleurs, on est tout de même assez loin de l’ambiance Mad Max.

Un des points prégnants de ce roman est son étonnant coté optimiste. Face au cataclysme et à la difficulté de survivre au quotidien, l’auteur a voulu focaliser son propos sur la volonté de quelques hommes de s’en sortir par le haut, malgré leurs différences et leurs divergences. Rien de manichéen pour autant, la haine et la brutalité font partie du quotidien. Et rien ne dit que ces bonnes intentions ne resteront pas lettre morte. D’ailleurs, dès les premières pages, l’écrivain annonce la mort d’un des personnages centraux. L’homme est un animal, social parfois.

Aventure humaine

Deon Meyer a un sens de l’intrigue hors norme. A coups de chapitres courts, il a construit une intrigue riche et pleine de surprises. Le mélange de types de narration rend le tout particulièrement dynamique. Une aventure humaine énergique, qui mélange passage guerrier, réflexions sociétales et philosophiques, sans que jamais l’aspect divertissement ne soit mis de coté. Une belle preuve qu’il est possible d’avoir une vraie hauteur de vue tout en racontant une histoire prenante et facile d’accès.

Ce récit raconte l’interruption de ce que l’homme était en train de façonner (et de détruire). Il conte comment quelques personnages (inoubliables) tentent de construire.

Ce que j’ai pu ressentir durant cette lecture est extrêmement rare. Des émotions tellement fortes, une immersion tellement profonde, que je ne voulais pas arriver au bout du roman (qui fait tout de même 628 pages). J’ai eu le sentiment de tenir entre mes mains un joyau, le genre de roman que j’ai toujours rêvé de lire, cette impression que j’aurais adoré imaginer une histoire pareille et qu’elle est telle que je l’aurais pensée. Une telle connexion avec une œuvre et un auteur est singulière.

J’ai lu de très nombreux récit post-apocalyptiques. Ils sont peu à m’avoir fait ressentir autant d’émotions. L’année du lion est un roman d’aventure, avec les ingrédients pour toucher tous les publics. Il restera marqué pour longtemps dans mon esprit. Inoubliable.

Citation :

Père dit que nous sommes les seuls organismes qui peuvent changer fondamentalement leur comportement parce que nous sommes capables de créer des fictions. Des fictions tellement grandes et décisives qu’elles rassemblent les humains en groupes de plus en plus importants, pour faire des choses de plus en plus impressionnantes.

Sortie : 19 octobre 2017

Éditeur : Seuil

Genre : aventure Post-apocalyptique

Ce que j’ai particulièrement aimé :

L’univers exceptionnel inventé par l’auteur

Sa manière de raconter l’histoire

Ses personnages, formidables

Les émotions et valeurs véhiculées

4° de couverture

Ils ont tué mon père.
Je les aurai.
Après la Fièvre qui a décimé les neuf dixièmes de la race humaine, mon père, Willem Storm, a fondé Amanzi, une nouvelle colonie, et l’a menée du chaos à l’ordre, de l’obscurité à la lumière, de la famine à l’abondance.
Je suis Nico Storm, formé par Domingo à l’art de tuer.
Je détestais mon père et je le vénérais.
Ils l’ont abattu à Witput, dans notre beau Karoo, en bordure de l’ombre effacée d’un cercle d’irrigation.
Je vais trouver ses tueurs et je le vengerai.
Ce qui suit est mon histoire.



Catégories :Littérature

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22 réponses

  1. Magnifique roman, et excellente critique comme d’habitude Yvan ! je te félicite !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Merci ;-). Tu vois, tu avais posé tes jolis mots avant moi sur ce roman 😉

  2. Olé, mais comment tu veux que l’on résiste maintenant! Tous ses mots choisis, me disent que si je ne le lis pas, je vais passer sans doute à coté de quelque chose de grand…
    Allez dans ma WISH….Merci pour la découverte! 2018, ne va pas arrangé ma PAL on dirait si e continue à passer par chez toi….

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      tu n’as pas le droit de résister, c’est pas plus compliqué que ça 😉

  3. Extraordinaire roman qui change de ce qu’a écrit Deon Meyer par le passé. Un roman sur l’humanité, avec comme tu le dis, des valeurs humanistes. J’ai adoré ! C’est un bien beau billet que tu nous a fait là. Amitiés

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Merci ! J’ai essayé de rendre hommage au mieux à cet extraordinaire roman

  4. Dionysos – Kaamelotien de souche et apprenti médiéviste, qui tente de naviguer entre lectures récréatives et lectures instructives, entre bandes dessinées, essais historiques, littératures de l’imaginaire et quelques incursions vers de la littérature plus contemporaine. Membre fondateur du Bibliocosme.

    Chouette, Deon Meyer qui fait de la science-fiction ! 😉

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      pas besoin de catégoriser ce roman, qui peut être lu par tous 😉

      • Dionysos – Kaamelotien de souche et apprenti médiéviste, qui tente de naviguer entre lectures récréatives et lectures instructives, entre bandes dessinées, essais historiques, littératures de l’imaginaire et quelques incursions vers de la littérature plus contemporaine. Membre fondateur du Bibliocosme.

        Tout à fait, mais je suis content que ce genre de thème soit utilisé.

  5. Je n’ai jamais lu Deon Meyer, mais ce titre m’interpelle vraiment !!

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Autant te lancer dans celui-ci justement alors !

      • Peut-être que je vais le gagner à ton concours du top 30 😉

        • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

          Tu le sauras vite 😉

  6. whaouh, superbe billet. Et hop noté avec un grand N ! Bonne année au fait.

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Eheh merci pour cet enthousiasme ! Et bonne année !

  7. Cela donne envie de le lire et de le relire : je ne savais pas qu’il était d’origine sud-africaine.

  8. Collectif Polar : chronique de nuit – Simple bibliothécaire férue de toutes les littératures policières et de l'imaginaire.

    Quelle belle critique tu nous fais là mon ami !
    C’est exactement ça !
    Quand l’être humain fait appelle à son humanité !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      merci ;-). Il fallait que je tente au mieux de faire passer mon enthousiasme !

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