Les cigognes pleurent quand elles sont loin de leurs foyers.
Pour son troisième roman, Lawren Schneider s’éloigne du thriller « traditionnel » pour plonger de plain-pied dans un étonnant mélange de genres. Les larmes des cigognes est une lecture particulière pour plusieurs raisons.
Inclassable. Voilà un bel exemple de la stérilité du débat qui consiste à toujours vouloir ranger les livres dans des boites hermétiquement scellées. Ce roman est tout à la fois un roman historique, un roman initiatique, un thriller, un récit fantastique. Ce qui pourrait paraître comme un pari un peu fou est, au final, une intéressante réussite.
Et puis, c’était une gageure que de faire le lien entre deux époques et deux périodes de vie aussi éloignées : l’adolescence durant les années 80 en Alsace, et un pan de la deuxième guerre mondiale avec ces Malgré-nous alsaciens incorporés de force dans la Wehrmacht et envoyés sur le front russe.
Captivant. En 325 pages, l’auteur réussi globalement son pari de raconter une (des) histoire(s) passionnante(s), avec des personnages forts. J’aurais aimé quelques pages supplémentaires tant les thèmes traités sont foisonnants, il y avait largement la place.
Instructif. Le sort de ces Malgré-nous est mal connu en France. Une histoire dans l’Histoire, tragique parmi d’autres tragédies… On sent que Lawren Schneider a fait des recherches sur le sujet, sans jamais perdre de vue sa ligne de conduite. Le roman ne se veut en rien un cours d’histoire mais parle principalement d’hommes confrontés à l’horreur absolue.
Émouvant. Le récit est vécu à travers les yeux des personnages et on sent régulièrement poindre l’émotion qu’a ressentie l’auteur durant l’écriture. Une émotion aussi palpable que communicative.
Nostalgique. Cette lecture a été, à titre personnel, une vraie expérience. Je suis d’Alsace et j’y ai vécu mon adolescence durant les années 80. Autant dire que les passages se déroulant dans la région en 1986 ont particulièrement résonné en moi. Étrange mais agréable sensation de retour en arrière, tout sonnant particulièrement vrai.
Surprenant. Retrouver ainsi une part de fantastique, assez légère, dans un récit aussi ancré dans la réalité est plutôt déconcertant de prime abord. Même constat sur la partie qui s’apparente au thriller. Mais ça fonctionne globalement bien, sans jamais dénaturer le propos ni le rendre irrespectueux par rapport au devoir de mémoire.
Lawren Schneider est un auteur auto-édité. L’auto-édition est une jungle, puisqu’il est maintenant possible à tout le monde (et n’importe qui) de sortir un roman. Même s’il manque un peu de personnalité, le style de l’auteur est de qualité. Du boulot fait avec les moyens de bord mais qui n’a rien à envier à certains romans édités dans le circuit traditionnel.
Les larmes des cigognes mérite l’attention des lecteurs qui sont à la recherche de romans forts et touchants, un peu éloignés de leur zone de confort.
Sortie : 19 novembre 2017
Éditeur : auto-édition
Genre : Roman noir
Ce que j’ai particulièrement aimé :
Le mélange des genres
Le lien fait entre les époques
Le sujet
4° de couverture
1943
Cette nuit-là, Louis n’arrivait pas à trouver le sommeil. Peut-être devenait-il fou tout simplement.
« Je crois que j’ai des visions, un peu comme Bernadette à Lourdes. C’est comme si j’étais rentré dans son corps. Il a cogné une femme. De toutes ses forces. Les coups de poing lui ont explosé le visage, puis elle s’est évanoui »
1986
« Je m’appelle Christophe et j’aimerais vous confier mon secret : je suis capable de voir des choses que vous ne voyez pas… »
Je vois bien à vos têtes que cela vous paraît débile… Putain, il faut que je commence par le début sinon vous n’y comprendrez rien…
« Tout a démarré il y a quelques mois. Ma mère m’avait serré dans ses bras. Un câlin de maman. J’ai posé ma main sur sa nuque et… j’ai eu ma première vision. C’est comme si j’avais plongé dans son corps, comme si j’avais vu à travers ses yeux »
Louis, « malgré-nous » enfermé dans le camp de Tambov est en proie à des visions terriblement réalistes. 43 ans plus tard, Chris, son petit-fils confie à ses amis qu’il a le même don. Il n’aurait jamais dû en parler…
Lien vers le site internet de Lawren Schneider
Catégories :Littérature
Il m’a l’air intéressant! Je me le note 😉
Merci pour cette belle découverte qui sort des sentiers battus 😉
oui, il faut parfois sortir des sentiers battus ;-). Ce que tu fais régulièrement, d’ailleurs
J’essaye… la chance d’avoir des ailes féeriques sans doute! 😉
https://polldaddy.com/js/rating/rating.jsChronique qui donne envie de le lire
alors j’en suis content 😉
Hâte de le lire, et c’est pour les jours à venir… Merci Yvan pour ce retour
curieux de ton avis !
Les malgré-nous, j’avais lu un article dans le Monde et pris conscience des aberrations de notre monde. Bigre, je n’eusse pas voulu être à leur place !! Ni avant la reprise de l’Alsace-Lorraine, ni après la guerre.
Je note ce roman !!
c’est l’histoire de ma région et pourtant on en parle assez peu de nos jours
On a l’habitude de tirer un voile sur nos exactions, sur les choses qui nous feront rougir, mais on aime donner des leçons aux autres !
Le Monde m’avait bien éclairé. Dommage que lui aussi soit aux mains des industriels et dépendant de la pub, il a perdu son indépendance et je le pleure encore.
Héhé, voilà qui fait plaisir,
Un auteur local, une histoire local.
Ce livre ne pouvait pas t’échapper.
Rencontrer trop brièvement Lawren au FSN, mais très très sympa le bonhomme en plus !
exactement, humble et sympa. Et son roman vaut la peine qu’on s’y attarde
J’ai pas lu celui-ci mais j’ai découvert sa plume grâce à une de mes flingueuse qui a attisé ma curiosité. Et j’ai bien aimé. J’espère pouvoir revenir vers lui sous peu !