C’est le cœur qui lâche en dernier – Margaret Atwood

Avec C’est le cœur qui lâche en dernier, Margaret Atwood nous sert une farce noire dont la lecture de certains passages ont de quoi rendre écarlate.

Dystopie carcérale

Futur (très) proche, l’économie s’est effondrée, on cherche à survivre par tous les moyens. Une entreprise propose de vivre le rêve américain, une semaine sur deux. La première semaine dans un pavillon propret et un environnement aseptisé, dont il est impossible de sortir. La seconde, en prison, en intervertissant les places d’un couple qui prend le chemin inverse. Bienvenue dans la dystopie carcérale d’une auteure dont l’imagination et la clairvoyance n’ont pas de limites.

Margaret Atwood est une visionnaire et une militante. La servante écarlate, datant de 1985, a été remis sur le devant de la scène grâce à la série TV qui vient d’en être tirée. Ce qu’elle imaginait il y a trente ans a de quoi mettre mal à l’aise dans le contexte actuel. Son extraordinaire trilogie d’anticipation questionne sur notre avenir proche avec un capacité quasi divinatoire (Le Dernier Homme, 2005 – Le Temps du déluge, 2012 – MaddAddam, 2014).

Drôle et dérangeant

L’auteure est une magnifique conteuse doublée d’une remarquable observatrice de notre société. Avec C’est le cœur qui lâche en dernier, elle creuse encore davantage ce sillon analytique au travers, cette fois-ci, d’une étonnante comédie sombre. Un récit qui tient autant du roman social que du vaudeville.

Le ton est décalé, surtout dans sa seconde partie, une autre manière de planter un décor subtilement effrayant tout en alertant sur certaines dérives de notre société actuelle.

Les choix que nous faisons ont un prix, l’acceptation tacite de la perte de nos libertés individuelles n’est pas sans conséquences. Ou quand la peur de l’avenir et le besoin de sécurité peuvent amener une certaine utopie vers une dictature.

Le ton parfois léger et drolatique, rend cette lecture franchement surprenante. Sous couvert d’une histoire d’amour décalée, Atwood dérange. Et les quelques scènes grivoises et sexuellement explicites ne font que renforcer ce sentiment.

Narration originale

Voilà un roman pas comme les autres, entre roman d’anticipation, sombre étude de mœurs, satire et romance dissonante. Sans doute que ce choix audacieux de narration ne plaira pas à tout le monde. Pour ma part, je l’ai trouvé aussi surprenant que réjouissant. Une manière originale de montrer qu’il est de plus en plus difficile de trouver sa place dans cette société qui se déshumanise. Le propos me parle fortement, la manière de l’avoir traité m’a réjoui, les dialogues (très nombreux) m’ont épaté.

Je ne saurais trop vous conseiller de vivre quelques heures avec ses « Alternants », l’expérience vaut la peine d’être vécue. Margaret Atwood est un écrivain majeur, ce n’est pas ce roman étonnant qui va le contredire.

Sortie : 17 août 2017

Éditeur : Robert Laffont

Genre : Anticipation / Fiction

Traduction :  Michèle Albaret-Maatsch

Ce que j’ai particulièrement aimé :

Les réflexions visionnaires d’Atwood

La manière décalée de traiter le sujet

L’écriture

4° de couverture

Stan et Charmaine ont été touchés de plein fouet par la crise économique qui consume les États-Unis. Tous deux survivent grâce aux maigres pourboires que gagne Charmaine dans un bar sordide et se voient contraints de loger dans leur voiture… Aussi, lorsqu’ils découvrent à la télévision une publicité pour une ville qui leur promet un toit au-dessus de leurs têtes, ils signent sans réfléchir : ils n’ont plus rien à perdre.

À Consilience, chacun a un travail, avec la satisfaction d’œuvrer pour la communauté, et une maison. Un mois sur deux. Le reste du temps, les habitants le passent en prison… où ils sont également logés et nourris ! Le bonheur. Mais le système veut que pendant leur absence, un autre couple s’installe chez eux avant d’être incarcéré à son tour. Et Stan tombe bientôt sur un mot qui va le rendre fou de désir pour celle qui se glisse entre ses draps quand lui n’y est pas :  » Je suis affamée de toi. « 



Catégories :Littérature

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21 réponses

  1. Voilà une auteure que j’aimerai bien découvrir!

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      oui c’est vraiment une auteure majeure

  2. Il est dans ma PAL, mais j’hesitais à le sortir ! Mais du coup tu me donne envie 😉

  3. Il me tarde de découvrir enfin la plume de cette auteure…

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      C’est une auteure qui vaut le détour. Ce dernier est différent (en même temps, elle ne se répète jamais, pour ceux que j’ai lu)

  4. https://polldaddy.com/js/rating/rating.jsToutes les critiques ne sont pas aussi enthousiastes que la tienne… cet autre son de cloche me permet d’hésiter à nouveau. 😉

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      je ne suis pas étonné. le parti pris de l’auteure est audacieux et ne peux pas plaire à tout le monde. Pour ma part, j’ai adhéré

  5. belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

    J’étais persuadée que c’étaient les intestins qui se lâchaient en dernier… La sortie, elle est où ?? 😆

    Bon, lui, je zappe, mais je dois lire la servante écarlate et le regarder, aussi, en série !

  6. Collectif Polar : chronique de nuit – Simple bibliothécaire férue de toutes les littératures policières et de l'imaginaire.

    Fan de cette auteur canadienne, tu le dis c’est une visionnaire mais aussi une militante.
    Je suis super heureuse que l’adaptation de la servante écarlante lui est redonner un second souffle. Le livre était malheureusement plus disponible et édité en France depuis quelques années.
    Du coup Margaret Atwood revient sur le devant de la scène et c’est de nouveaux lecteurs qui vont être conquis, pour ne pas dire conquises car en le sais 80% des lecteurs sont des lectrices !

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      oui c’est une très bonne nouvelle ! J’aurais du rajouter « militante », tu as raison ! (je vais le faire, tiens). le rare homme lecteur te remercie 😉

  7. Lord Arsenik – Noumea - Nelle-Calédonie

    J’ai La servante écarlate dans ma PàL depuis un sacré bail et dernièrement je me suis laissé tenter par ce roman. yapuka réussir à caser tout ça dans mon programme de lecture 😉

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