Inclassable
Mato Grosso est un roman totalement inclassable, à la fois aventure humaine, polar, livre de voyage… Un périple littéraire aussi dépaysant que prenant, un roman ambitieux dans la forme comme dans le fond.
Ce récit se veut être une insertion au plus profond du Brésil, à une période – les années 70 – où le pays débutait son essor et ressemblait encore à une sorte de Far West.
Mato Grosso est un roman tout en sensations ; odeurs, moiteur, lumière, couleurs… Une histoire construire (en partie) sur les souvenirs de voyage de l’auteur, à cette époque. Regard d’un français sur le Brésil. Un protagoniste qui se fait littéralement happer, digérer et assommer par ces contrées où les étrangers sont juste tolérés.
Exigence et sensualité
Il faut savoir se laisser porter par la prose de Ian Manook. Après une introduction intrigante, l’écriture se fond dans l’atmosphère tropicale, avec une certaine nonchalance contemplative, pour rebondir ensuite dans une ambiance plus noire. Mato grosso est une sorte de road trip exotique, qui tourne parfois au récit naturaliste, d’autre fois à la tragédie. Inclassable, je vous l’ai dit !
Voilà un roman aussi exigeant que sensuel dans sa forme, aussi réfléchi qu’animal. « La raison n’existe pas au Brésil », dit le personnage, dont le comportement oscille entre amour, passion, obsession, jalousie et possessivité.
C’est un jeu de piste, dans le passé et dans ses répercussions présentes. Une tragédie sublimée par une écriture particulièrement travaillée. D’ailleurs, Manook en profite pour lancer des réflexions sur l’art d’écrire, dans ce jeu entre réalité et fiction, et sur le rôle de l’écrivain. Peut-on tuer par les mots ?
Même si je lui ai trouvé parfois quelques longueurs, ça n’a en rien gâché mon intérêt de lecture et elles sont plutôt logiques dans la manière dont l’auteur a pensé son récit.
Ouverture d’esprit
Parce que Mato Grosso est vraiment un roman étonnant. Une ambiance surannée dans une construction très moderne, des moments de tension qui côtoient de la poésie en prose. Et puis, c’est l’occasion pour l’écrivain de partager son amour pour Stefan Zweig, intelligemment introduit dans l’intrigue.
Mato Grosso est un roman qui a une âme, à l’image du paysage foisonnant où il se déroule. Dur aussi, par ses personnages complexes, assez peu avenants. Un récit où l’immédiateté du présent s’entrechoque avec les blessures du passé, au travers du point de vue distordu du personnage principal, écrivain de son état. Une mise en abîme, parfois déroutante, souvent ensorcelante. Un livre qui montre à quel point Ian Manook est un auteur au talent étonnant et qui va nous surprendre à chacun de ses écrits. Ouvrez votre esprit et soyez curieux, ça en vaut la peine. A titre personnel, j’ai le sentiment de ressortir enrichi de cette lecture.
Lien vers l’interview réalisée avec Ian Manook au sujet de Mato Grosso
Sortie : 04 octobre 2017
Éditeur : Albin Michel
Genre : Roman (noir, mais pas que…)
Ce que j’ai particulièrement aimé :
L’ambiance, immersive
L’écriture travaillée
La construction intelligente
4° de couverture
Mato Grosso. Une odeur sauvage de terre trop riche et d’humus brun. La beauté vénéneuse de la jungle dans laquelle on s’enfonce jusqu’à s’y noyer. La violence du ciel et la moiteur des nuits. L’amour qui rend fou et la mort… incontournable.
Est-ce pour faire la paix avec lui-même que Haret, écrivain bourlingueur, est revenu après un exil de trente ans ? Est-ce parce qu’il a le sentiment que c’est la dernière fois ?
Dans un Brésil luxuriant jusqu’à l’étouffement, peuplé d’aventuriers, de trafiquants et de flics corrompus, le nouveau roman de l’auteur de Yeruldegger nous ensorcelle et nous prend à la gorge.
Catégories :Littérature
Je n’ai pas d’a priori puisque jamais lu cet auteur qui me tente cependant beaucoup !
c’est déjà ça ;-). Oui tu devrais vraiment tenter l’aventure
ET bien, en voilà un que j’ajoute direct en wish! Ca me plait bien ce voyage au Brésil et j’aime bien l’idée d’un roman inclassable….Merci pour ce bel avis, on sent que tu as été touché 😉
oui, touché. Bon voyage alors !
Mais tu me tentes beaucoup avec ta chronique 🙂
Il faut dire que le sieur Manook est pétri de talent 😉
comme tu dis ! 😉
Rhoooo, tu l’as déjà !
Et déjà lu !!!
Hé bien, je me disais que je jetterais bien un coup d’oeil à ce changement de registre chez Manook, voilà une chronique qui achève de titiller ma curiosité ! Vais tâcher de lui trouver une petite place dans ma PAL polar du mois d’octobre déjà fort remplie 🙂
Un vrai changement de registre oui, mais quel talent ! Très curieux d’avoir ton avis là-dessus !
J’ai déjà les nouveaux Norek, Lehane et Deon Meyer en urgence dans la PAL, donc ça ne sera pas pour tout de suite… mais à suivre, indubitablement !
Norek en priorité. Je dis ça je dis rien
Je l’attaque aujourd’hui, ça tombe bien 🙂 (Et j’ai hâte !!!)
Moi je ne m’en suis pas remis
Là, avec une chronique, tu me tentes deux fois !! Tu devrais avoir honte, et pas GROSSO modo, mais fissa !!
Bon, j’aimais la Mongolie, mais je ne sais pas pourquoi, la cuisine brésilienne me tente plus que la mongole… les yeux de chèvre, le raviolis bizarres et le thé au beurre rance ne m’ont jamais émoustillés les papilles gustatives ! 😆
concernant l’aspect gustatif, je suis d’accord 😉
Hormis des mongols ou des masos amateurs de tripes et boyaux (suivez mon regard), je pense que la majorité des lecteurs/trices ne sont pas emballés par la cuisine de Mongolie et encore moins par le thé au beurre rance, même la théinomane Ida !
Je ne sais pas… La Mongolie quand même… 😉
Froid, chaud, faut alterner toi qui aime les voyages 😉
C’est vrai… 🙂
Il va créer la controverse mais je suis à 100% d’accord avec toi.
Un roman étonnant qui va surprendre les lecteurs de Ian
Il vaut la peine qu’on lui donne sa chance, sans penser aux précédents !
clairement
Si la découverte du Brésil vous tente après la lecture de ce livre, lisez Jean Paul Delfino qui est un amoureux inconditionnel de ce pays.
Commencez par l’ombre du Condor puis Corcovado, vous ne serez pas dépaysés
merci pour le conseil, Thierry !