Le sang du monstre – Ali Land

chronique-litteraire

Bon sang, quel excellent roman ! L’éditeur Sonatine est définitivement incontournable pour qui est amateur de thrillers psychologiques puissants et inventifs.

Enfance traumatique

Pour sortir du lot d’un sous-genre littéraire aussi prolifique, il faut trouver sa voix. Ali Land a clairement trouvé la sienne dès son premier roman. Le sang du monstre est une plongée dans la psyché d’une adolescente de 15 ans ayant passé toute sa vie au coté d’une mère « différente ». Une maman extrêmement présente, infirmière le jour, tortionnaire et tueuse en série la nuit… Jusqu’à qu’elle la dénonce et se retrouve placée en famille d’accueil.

Comment se sort-on d’une enfance traumatique, où les repères ont été inculqués à travers le prisme d’un esprit malade et violent ? Comment trouver sa place dans une société qui elle-même accepte la violence des relations quotidienne ?

Ali Land est une ancienne infirmière en pédopsychiatrie et a toujours été fascinée par la santé mentale des ados. Une fascination que l’on retrouve dans chaque paragraphe de cet épatante histoire et les yeux cette jeune fille narratrice (le roman est écrit à la première personne).

Hyper expressivité

Mais qu’est-ce-qui peut bien faire la différence et sortir ce roman du lot ? Sa narration justement et l’abîme de cette plongée psychologique. Ali Land est anglaise. On est donc loin du style parfois assez lisse des romans d’outre-atlantique. Le style de l’auteure est hyper expressif, parfois cru, et tellement empli de sous-entendus que le lecteur ne sait jamais sur quel pied danser.

Le genre de lecture qui rend nerveux ; syndrome des jambes sans repos ; la boule au ventre tant on s’attache au personnage tout en craignant de découvrir ce qui se cache derrière sa personnalité complexe.

Difficile de garder son sang-froid face à cette intrigue dure et cette écriture syncopée. Ali Land découpe son style tout autant qu’elle autopsie les pensées de son héroïne. Écriture haletante, changement de tempos, et le lecteur est pris à la gorge à force de découvrir l’inconcevable de ce qu’à vécu Annie durant son passé. Et à se faire un sang d’encre également, à la suivre, tentant de se faire une place dans le monde impitoyable des adolescents.

Subtilité qui engendre le malaise

Le récit est admirablement construit, sans que l’auteure n’en fasse des tonnes, toujours avec une subtilité qui engendre le malaise. Le sang du monstre est un roman sur la complexité des relations parents-enfants, le lien indéfectible qu’on peut avoir avec un géniteur pourtant violent. On ressent la culpabilité que peut éprouver la victime et son sentiment de ne pas être normale. On vit à fond, en accompagnant la narratrice, les doutes, les failles et les comportements induits d’une telle « éducation ». Toujours avec finesse. Un personnage tellement fort qu’on l’imagine fait de chair et de sang tout au long de ces 350 pages. Bon sang ne saurait mentir ?

Et puis il y a cette réflexion sur la violence adolescente et leur difficulté à trouver leur place sans se perdre dans les excès. Un sujet dans le sujet qui ne fait qu’accentuer la tension.

Ali Land frappe fort avec son premier roman. Elle a clairement quelque chose dans le sang et un talent qui explose à travers sa narration très personnelle, vivante et suggestive. Une belle réussite qui prend aux tripes.

Sortie française : 22 septembre 2016

Éditeur : Sonatine

Genre : Thriller

Traduction : Pierre Szczeciner

Mon ressenti de lecture :

Profondeur : 8/10

Dimension de l’intrigue : 8/10

Psychologie : 9/10

Qualité de l’écriture : 8/10

Émotions : 8/10

Note générale : 8/10

4° de couverture

Après avoir dénoncé sa mère, une tueuse en série, Annie, quinze ans, a été placée dans une famille d’accueil aisée, les Thomas-Blythe. Elle vit aujourd’hui sous le nom de Milly Barnes et a envie, plus que tout, de mener une existence normale et d’être quelqu’un de bien.

Elle a néanmoins beaucoup de difficultés à communiquer avec les ados de son âge et préfère les enfants plus jeunes, plus particulièrement une petite fille vulnérable du voisinage. Sous son nouveau toit, elle est la proie des brimades de Phoebe, la fille des Thomas-Blythe, qui ignore tout de sa véritable identité.

À l’ouverture du procès de la mère de Milly, qui fait déjà la une de tous les médias, la tension monte d’un cran pour la jeune fille dont le comportement va bientôt se faire de plus en plus inquiétant.



Catégories :Littérature

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13 réponses

  1. Belle chronique ! (Mais est-ce une surprise ? 😉 )
    Je ne suis pas sûr d’avoir envie de lire ce genre d’histoire en ce moment, mais pour un peu, tu me ferais changer d’avis 🙂

  2. Et bien, je vais donc me régaler…Je pars confiante sur ma prochaine lecture….;)

  3. J adore ce style de livre. L histoire me plaît bien. Et puis j ai l impression qu il sort un peu des sentiers battus. Je prends …merci Yvan ! Bises

  4. Oh putain!!! Rien que le pitch est déjà accrocheur. Ça me paraît bien engageant tout ça…
    A ne pas négliger, c’est une piste à suivre… 🙂

  5. Bon même sans ton retour je l’avais déjà noté suite à ton précieux conseil, tu ne fais qu’enfoncer le clou avec cette superbe chronique. Tu le sais je suis aussi accro des thrillers psy et romans noirs de Sonatine que toi, donc… 😀

  6. belette2911 – Grande amatrice de Conan Doyle et de son "consultant detective", Sherlock Holmes... Dévoreuse de bouquins, aussi ! Cannibal Lecteur... dévorant des tonnes de livres sans jamais être rassasiée, voilà ce que je suis.

    Aaaaaah, je dois le lire !!! Faudra pas que je traine en route !

  7. je suis déjà conquise ! 🙂

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Franchement, ils sont forts ces anglais

  8. Collectif Polar : chronique de nuit – Simple bibliothécaire férue de toutes les littératures policières et de l'imaginaire.

    Quelle magnifique chronique tu fais là de ce très beau premier roman. Une claque mon ami, une claque ! Merci à toi pour ce ressenti vachement bien senti ! 🙂

    • Yvan – Strasbourg – Les livres, je les dévore. Tout d’abord je les dévore des yeux en librairie, sur Babelio ou sur le net, Pour ensuite les dévorer page après page. Pour terminer par les re-dévorer des yeux en contemplant ma bibliothèque. Je suis un peu glouton. Qui suis-je : homme, 54 ans, Strasbourg, France

      Merci ;-). Ah oui une claque que je n’attendais pas !

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